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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration- 61. Le comité a examiné pour la dernière fois ce cas concernant le déni
du droit syndical des employés du secteur public, des obstacles à la constitution de
syndicats indépendants dans le secteur privé, ainsi que le refus du gouvernement de
promouvoir un dialogue social inclusif et constructif à sa réunion de juin 2015. [Voir
375e rapport, paragr. 46-55.] A cette occasion, le comité: i) a prié le gouvernement de
le tenir informé de l’avancée du processus de ratification de la convention (nº 87) sur
la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; ii) a exprimé le ferme
espoir que les modifications législatives aux articles 86, 87, 89 et 105 du Code du
travail et aux dispositions du Statut du personnel interdisant aux fonctionnaires du
secteur public de constituer des organisations et de s’y affilier seront effectuées dans
un proche avenir pour être en pleine conformité avec les principes de la liberté
syndicale; iii) a prié le gouvernement d’indiquer les dispositions législatives
spécifiques en vigueur garantissant aux travailleurs domestiques leurs droits syndicaux,
notamment celui de constituer et de s’affilier à des organisations de leur choix; iv) a
prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de s’assurer qu’en cas
d’élections syndicales nécessitant une supervision externe celle-ci est assurée par des
autorités compétentes; et v) a prié le gouvernement de préciser quels sont les critères
objectifs et fixés d’avance qui permettent de déterminer quelle est l’organisation la
plus représentative et, si de tels critères n’existent pas, de prendre les mesures
nécessaires pour les définir, en pleine consultation avec les partenaires sociaux
concernés.
- 62. Dans une communication en date du 5 octobre 2015, le gouvernement
rappelle que: i) le Code du travail libanais permet aux employeurs ainsi qu’aux
travailleurs, dans chaque catégorie de professions, de constituer un syndicat qui jouit
d’une personnalité morale et du droit d’ester en justice; ii) l’article 13 de la
Constitution libanaise établit le droit à la liberté de réunion et la liberté
d’association et la loi sur les associations du 3 août 1909 établit le droit de créer
des associations en vertu du récépissé définitif de la déclaration («elem wa khabar»);
iii) l’adhésion du Liban à la Déclaration universelle des droits de l’homme a conféré à
toute personne le droit de constituer un syndicat ou d’adhérer à un syndicat pour
défendre ses intérêts; iv) la création des syndicats se fait en totale indépendance des
personnes concernées, sans aucune ingérence ou consigne des autorités dont le rôle se
limite à l’octroi d’une autorisation; v) les autorités s’attachent à éviter la pluralité
syndicale au sein d’une même catégorie pour écarter toute compétition ou conflit aux
conséquences néfastes entre les syndicats et éviter toute manipulation visant à échanger
un acronyme par un autre, dans un but de créer des syndicats dont la prolifération
porterait parfois préjudice aux parties prenantes; et vi) le gouvernement n’a jamais
refusé de promouvoir et d’encourager le dialogue social, car il croit en la
participation et en la représentation tripartite au sein des conseils d’arbitrage du
travail et des conseils d’administration de plusieurs organismes.
- 63. Le gouvernement indique également que la convention no 87 a été
transmise à l’Assemblée nationale et ce point est inscrit à l’ordre du jour des
commissions paritaires mais que les circonstances par lesquelles passe le Liban du fait
qu’il est privé de Président de la République font que le pouvoir législatif et le
pouvoir exécutif se retrouvent, à présent, dans une paralysie totale.
- 64. Le gouvernement ajoute que suite à la ratification de la convention
no 87, les lois seront modifiées conformément aux dispositions de la convention afin de
permettre aux fonctionnaires du secteur public de constituer des syndicats et d’exercer
leurs droits syndicaux mais qu’en attendant ces travailleurs exercent leur activité
syndicale, même si elle revêt une nomenclature qui n’est pas tout à fait la même. Le
gouvernement précise en outre que les membres d’une organisation qui n’obtient pas
l’autorisation du ministère du Travail pour fonder un syndicat peuvent défendre leurs
intérêts par le biais d’une association ou d’un groupe sur la base d’un récépissé
définitif de leur déclaration, émis par le ministère de l’Intérieur et des
Municipalités, en vertu de la loi sur les associations du 3 août 1909 (au titre
d’exemple, l’association des fonctionnaires de l’administration publique, l’association
des professeurs du cycle secondaire et l’association des enseignants ont été établies
ainsi). En ce qui concerne l’amendement des articles 86, 87, 89 et 105 du Code du
travail qui confèrent au gouvernement le pouvoir d’autoriser ou de refuser la
constitution d’un syndicat, d’approuver le règlement intérieur des syndicats et de
dissoudre tout comité de syndicat qui n’a pas tenu compte des obligations qui lui sont
imposées, le gouvernement déclare qu’il n’y a aucun nouveau développement.
- 65. Au sujet des travailleurs domestiques, travailleurs agricoles et ceux
qui sont sous contrat avec le secteur public, le gouvernement indique que s’ils ont été
exclus du champ d’application du Code du travail en vertu de son article 7, celui-ci est
considéré comme étant quasi abrogé. Le gouvernement précise en outre que les actions en
justice auxquelles s’applique l’alinéa 1 de l’article 624 du Code des obligations et des
contrats (COC) relèvent de la compétence des conseils d’arbitrage du travail. Pour cela,
le COC s’applique aux travailleurs domestiques, tout comme aux travailleurs agricoles
qui ne sont pas employés dans des établissements agricoles à caractère industriel ou
commercial (quant à ceux qui sont sous contrat avec le secteur public, ils peuvent
s’adresser au Conseil d’Etat, et concernant une partie de leurs indemnités, ils peuvent
s’adresser aux tribunaux du travail, selon les juridictions). Le gouvernement indique
également que, tandis qu’il existe de nombreux syndicats de travailleurs et d’employeurs
dans l’agriculture, le ministère du Travail n’a reçu jusqu’à présent aucune demande de
créer un syndicat pour les travailleurs domestiques libanais, étant donné que la
constitution d’une association par les étrangers requiert l’approbation du Conseil des
ministres et qu’une personne étrangère n’a pas le droit de constituer un syndicat, de se
porter candidat ou de voter, mais elle peut adhérer à un syndicat, dans l’attente de
modifier le Code du travail pour tenir compte des observations à cet égard.
- 66. S’agissant de l’organisation syndicale la plus représentative, le
gouvernement réitère que le décret no 2390 du 25 avril 1992 (Identification des
institutions les plus représentatives des employeurs et des travailleurs salariés) est
actuellement en vigueur et qu’aucune communication provenant d’un syndicat ou d’une
fédération et prouvant sa représentativité dans un secteur donné n’a été reçue. Le
gouvernement précise néanmoins qu’il n’a aucune objection de renforcer les consultations
avec les fédérations et les syndicats afin de montrer le degré de leur
représentativité.
- 67. Le comité note les informations fournies par le gouvernement.
S’agissant de la ratification de la convention no 87, le comité prend note de la
situation politique actuelle au Liban et prie le gouvernement de le tenir informé de
l’avancée du processus de ratification et lui rappelle que, dans le but de mettre la
législation nationale, et en particulier les articles 86, 87, 89 et 105 du Code du
travail et le Statut du personnel, en conformité avec les dispositions de cette
convention, le gouvernement peut se prévaloir de l’assistance technique du Bureau.
- 68. Notant l’indication du gouvernement selon laquelle les autorités
s’attachent à éviter la pluralité syndicale au sein d’une même catégorie d’emploi pour
écarter toute compétition ou conflit aux conséquences néfastes entre les syndicats et
éviter toute manipulation visant à échanger l’acronyme d’un syndicat par un autre, le
comité rappelle au gouvernement: que si les travailleurs et les employeurs ont, en
général, avantage à éviter une multiplication du nombre des organisations concurrentes,
toute situation de monopole imposée par la loi est en contradiction avec le principe du
libre choix des organisations de travailleurs et d’employeurs; que l’existence d’une
organisation dans une profession déterminée ne doit pas constituer un obstacle à la
création d’une autre organisation, si les travailleurs le souhaitent; et qu’une
disposition autorisant le rejet de la demande d’enregistrement, si un autre syndicat
déjà enregistré est suffisamment représentatif des intérêts que le syndicat postulant se
propose de défendre, signifie que, dans certains cas, des salariés peuvent se voir
refuser le droit de s’affilier à l’organisation de leur choix, contrairement aux
principes de la liberté syndicale. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité
de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 313, 320 et 328.] A cet égard,
le comité invite le gouvernement à prendre les mesures nécessaires afin de permettre aux
travailleurs et employeurs – s’ils le souhaitent – de constituer plus d’une organisation
dans la même entreprise ou profession.
- 69. En ce qui concerne les droits syndicaux des travailleurs domestiques,
le comité note que le gouvernement déclare que la loi fixant les compétences des
conseils d’arbitrage du travail en vertu du décret no 3572 du 21 octobre 1980 considère
l’article 7 du Code du travail, qui exclut les travailleurs domestiques de son champ
d’application, comme étant quasi abrogé. Le comité observe que, même si la loi donne la
compétence aux conseils d’arbitrage du travail de statuer sur les actions en justice
auxquelles s’applique l’alinéa 1 de l’article 624 du COC, lequel s’applique aux
travailleurs domestiques, cela ne confère pas à cette catégorie de travailleurs les
droits syndicaux garantis par le Code du travail. En conséquence, le comité prie le
gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer le droit des travailleurs
domestiques de constituer et de s’affilier à des organisations de leur choix. A cet
égard, le comité observe que le gouvernement indique que la constitution d’une
association par les étrangers requiert l’approbation du Conseil des ministres et qu’une
personne étrangère n’a pas le droit de constituer un syndicat, de se porter candidat aux
fonctions syndicales ou de voter, mais qu’elle peut adhérer à un syndicat, dans
l’attente de modifier le Code du travail. Le comité rappelle que l’article 2 de la
convention no 87 entend consacrer le principe de la non-discrimination en matière
syndicale, et la formule «sans distinction d’aucune sorte», contenue dans cet article,
signifie que la liberté syndicale est reconnue sans discrimination d’aucune sorte tenant
à l’occupation, au sexe, à la couleur, à la race, aux croyances, à la nationalité, aux
opinions politiques, etc., non seulement aux travailleurs du secteur privé de
l’économie, mais aussi aux fonctionnaires et aux agents des services publics en général.
[Voir Recueil, op. cit., paragr. 209.] Ainsi, le comité estime que le droit des
travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations de leur
choix et de s’y affilier, sans autorisation préalable, implique que toutes les personnes
résidant dans le pays jouissent des droits syndicaux, y compris du droit de vote, sans
aucune distinction fondée sur la nationalité. Rappelant également qu’il y aurait lieu de
conférer une plus grande souplesse aux dispositions législatives, afin de permettre aux
organisations d’élire librement et sans entraves leurs dirigeants, et aux travailleurs
étrangers d’accéder aux fonctions syndicales, du moins après une période raisonnable de
résidence dans le pays d’accueil [voir Recueil, op. cit., paragr. 420], le comité prie
le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de permettre aux travailleurs
étrangers de bénéficier des droits syndicaux au même titre que les travailleurs de
nationalité libanaise et de le tenir informé de tout développement à ce sujet.