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Report in which the committee requests to be kept informed of development - REPORT_NO374, March 2015

CASE_NUMBER 3030 (Mali) - COMPLAINT_DATE: 15-MAI-13 - Follow-up

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Allégations: Licenciement massif de travailleurs et de syndicalistes pour faits de grève et activités syndicales légitimes dans le secteur des mines

  1. 505. La plainte figure dans une communication en date du 15 mai 2013 de la Confédération syndicale des travailleurs du Mali (CSTM).
  2. 506. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication en date du 27 mai 2014.
  3. 507. Le Mali a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, la convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971, ainsi que la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 508. Dans une communication en date du 15 mai 2013, la Confédération syndicale des travailleurs du Mali (CSTM) dénonce des licenciements massifs dans le secteur minier pour faits de grève.
  2. 509. De manière liminaire, en se référant à un précédent cas examiné par le Comité de la liberté syndicale qu’elle avait présenté (cas no 2756), l’organisation plaignante regrette que les recommandations du comité demandant sa participation dans les instances de consultation et de dialogue du pays n’aient pas été suivies d’effet. De plus, l’organisation plaignante dénonce la poursuite de l’ingérence du gouvernement dans le processus de nomination de la délégation des travailleurs à la Conférence internationale du Travail dans la mesure où ce dernier continue de nommer dans la délégation nationale deux représentants de l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM), dont le délégué titulaire pour les travailleurs, et un représentant de la CSTM. Ces nominations, sans consultation des organisations concernées, continuent de discriminer la CSTM. Or le gouvernement a reconnu, par rapport à la question de la représentativité syndicale, que le Code du travail était inadapté et imprécis et a ainsi décidé d’adopter un projet de modification du code.
  3. 510. Par ailleurs, l’organisation plaignante dénonce des licenciements massifs pour faits de grève dans le secteur des mines. Selon la CSTM, 531 travailleurs au total ont été licenciés. Parmi ces travailleurs licenciés figurent 11 syndicalistes de la Société d’exploitation des mines d’or de Sadiola (SEMOS SA), 27 syndicalistes et 31 militants de la société LTA-MALI SA, et 26 syndicalistes et 436 travailleurs de la société BCM SA à Loulo. L’organisation plaignante précise que les syndicalistes de la société SEMOS SA ont été licenciés sans l’accord de l’administration du travail, en violation des articles L.231 et L.277 du Code du travail du Mali. S’agissant des autres licenciements touchant 84 autres syndicalistes et 436 travailleurs, l’administration du travail a en revanche donné son accord.
  4. 511. Conformément à la législation en vigueur, un conseil d’arbitrage présidé par un magistrat a été constitué pour traiter les deux dossiers. Selon l’organisation plaignante, ce conseil a donné raison aux travailleurs. Or le gouvernement s’est déclaré incapable de faire appliquer la décision du conseil d’arbitrage. L’organisation plaignante demande la réintégration des travailleurs, conformément aux dispositions du Code du travail et à la décision du conseil d’arbitrage.
  5. 512. Enfin, l’organisation plaignante dénonce le licenciement de deux syndicalistes par les laboratoires Analytical Chemistry and Testing Service – Mali (ALS-MALI) pour avoir revendiqué des visites médicales pour 1’ensemble des travailleurs. Cette revendication a été faite alors que 11 travailleurs de la société présentent un taux de plombémie deux à trois fois supérieur à la normale. L’organisation plaignante regrette que l’administration du travail n’ait jamais réagi alors qu’elle a été saisie du dossier.
  6. 513. La CSTM demande le respect du droit malien relatif à la protection sociale, des principes directeurs de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à l’intention des entreprises multinationales et de la Convention collective des entreprises minières, géologiques et hydrogéologiques du Mali.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 514. Le gouvernement a présenté ses observations dans une communication en date du 27 mai 2014. De manière liminaire, concernant la question de la représentation de la CSTM au sein du Conseil d’administration des organismes publics et des organes de dialogue social, le gouvernement considère que l’organisation prochaine d’élections professionnelles qui permettront d’établir la représentativité des deux centrales syndicales nationales permettra de régler la situation. Toutes les parties sont d’accord pour l’organisation de telles élections, et les préparatifs ont débuté avec l’appui technique du Bureau international du Travail depuis mars 2014.
  2. 515. S’agissant des allégations d’ingérence dans la désignation de la délégation des travailleurs à la Conférence internationale du Travail, le gouvernement déclare qu’il est de règle que les partenaires sociaux s’entendent entre eux pour désigner les délégués titulaire et suppléant. Cependant, devant l’impossibilité de ces derniers à se mettre d’accord sur cette désignation, le gouvernement a décidé de maintenir le statu quo dans la représentation des travailleurs, à savoir la nomination du représentant de l’UNTM en tant que délégué titulaire et du représentant de la CSTM en tant que suppléant. Le gouvernement précise qu’une réunion organisée par la ministère du Travail à la veille de la Conférence de 2014 n’a pas non plus permis d’aboutir à un compromis sur cette question. Il a donc été décidé, en accord avec les deux centrales syndicales, de garder la même configuration dans l’attente d’un accord sur un système de rotation au sujet duquel les parties ont manifesté leur accord à partir de 2015.
  3. 516. S’agissant de manière générale de la question du licenciement des travailleurs dans le secteur des mines, le gouvernement précise que le dossier a fait l’objet de discussions à l’Espace d’interpellation démocratique, qui est une tribune populaire où les dirigeants sont interpellés par les citoyens sur la manière de gérer les affaires publiques.
  4. 517. En ce qui concerne la société LTA-MALI SA, le gouvernement indique que des délégués syndicaux, affiliés à la Fédération nationale des mines et de l’énergie (FENAME-CSTM), ont déposé un cahier de revendications au titre de l’année 2012. Les 28 et 29 juin 2012, sans négociation préalable, le comité syndical a organisé un mouvement de grève du personnel sous le prétexte de ne pas avoir été informé assez à l’avance de l’arrivée sur le site de l’inspecteur du travail, dépêché sur place le 18 juin 2012 par le directeur régional du travail pour une tentative de conciliation à laquelle les délégués du personnel ont refusé de participer. Suite à ces faits, l’entreprise a demandé à la Direction régionale du travail l’autorisation de licencier 27 responsables syndicaux pour abus dans l’exercice du droit de grève et intention manifeste de nuire à l’entreprise. Les travailleurs concernés ont été convoqués par le directeur régional du travail pour l’enquête réglementaire, mais ces derniers ont refusé de se rendre à la convocation. En conséquence, l’inspecteur du travail a accordé l’autorisation de licenciement sollicitée sur le mérite de la demande de l’employeur.
  5. 518. En ce qui concerne la société SEMOS SA, le gouvernement indique que le comité syndical, aussi affilié à la FENAME-CSTM, a remis à l’entreprise son cahier de revendications pour l’année 2012. Suite à l’échec de la tentative de conciliation menée les 28, 29 et 30 mai 2012 par la Direction régionale du travail, les responsables syndicaux ont observé une grève de deux jours, les 31 mai et 1er juin 2012. L’entreprise a alors saisi l’inspection du travail d’une demande d’autorisation de licenciement de 14 syndicalistes pour incitation à une grève illégale. L’inspecteur du travail a refusé d’autoriser les licenciements. Cependant, l’entreprise a décidé de passer outre le refus de l’inspecteur du travail en licenciant les syndicalistes concernés en octobre 2012.
  6. 519. Le ministère du Travail a été interpelé par la CSTM suite aux licenciements des responsables syndicaux des sociétés LTA-MALI SA et SEMOS SA à trois occasions: 1) pour réclamer la saisine d’un conseil d’arbitrage, en application de l’article L.225 du Code du travail; 2) pour solliciter un recours hiérarchique en annulation des licenciements et aussi donner effet à la sentence du conseil d’arbitrage; et 3) pour solliciter la saisine du Conseil des ministres, en vertu de l’article L.229 du Code du travail (1er août 2013).
  7. 520. Le gouvernement indique que, s’agissant de la saisine du conseil d’arbitrage, l’article L.224 du Code du travail dispose que, en l’absence d’accord, le conciliateur rédige un rapport sur l’état du différend et l’adresse au ministre en charge du travail. Aux termes de l’article L.225, ce dernier saisit le conseil d’arbitrage dès réception du rapport de non conciliation. En application de ces dispositions légales, le ministère du Travail a constitué le conseil d’arbitrage par une décision du 28 septembre 2012. Le conseil a statué sur les réclamations des syndicalistes et a rendu sa sentence le 7 janvier 2013, dans les termes qui suivent: 1) sur la levée des mesures de licenciement prises par LTA-MALI SA: «Le conseil d’arbitrage a estimé que cette décision de licenciement ne violait en rien la légalité. Cependant, il reste évident que l’autorisation de licenciement délivrée par l’inspecteur du travail viole les articles L.231 et L.277 du Code du travail. En conséquence, le conseil d’arbitrage retient la faute de l’inspecteur du travail de Kayes et non celle de l’employeur.»; et 2) sur les licenciements opérés par SEMOS SA, «Le Conseil a estimé que ces licenciements ne rentraient pas dans le cadre de sa saisine et a décidé de s’en tenir à la mesure de suspension. En conséquence, il a ordonné la levée pure et simple par SEMOS SA de la mesure de suspension des 14 responsables syndicaux.»
  8. 521. Concernant la demande d’annulation des licenciements individuels, le ministère du Travail a informé la FENAME que le droit commun du licenciement excluait toute intervention du ministre en charge du travail de la procédure de licenciement (lettre du 13 février 2013).
  9. 522. Enfin, en ce qui concerne la saisine du Conseil des ministres, l’article L.229 du Code du travail dispose que: «La décision du conseil d’arbitrage est immédiatement notifiée et commentée aux parties par le président du conseil d’arbitrage. Si, dans les huit jours francs, suivant cette notification aux parties, aucune de celles-ci n’a manifesté son opposition, la décision acquiert force exécutoire. Pour les conflits intéressant les services essentiels dont l’interruption risquerait de mettre en danger la vie, la sécurité ou la santé des personnes, de compromettre le déroulement normal de l’économie nationale, ou intéressant un secteur vital des professions, le ministre chargé du travail, en cas de désaccord de l’une ou des deux parties, porte le conflit devant le Conseil des ministres qui peut rendre exécutoire la décision du conseil d’arbitrage.» Le gouvernement indique que, en l’espèce, la saisine du Conseil des ministres n’a pas été considérée comme opportune dans la mesure où les entreprises minières ne sont pas considérées comme des services essentiels, au sens de la législation pertinente.
  10. 523. Enfin, le gouvernement fait état de décisions rendues par le tribunal du travail de Kayes suite à des recours de certains salariés de LTA-MALI SA et de la saisine par la société SEMOS SA en réclamation de dommages-intérêts pour le préjudice subi du fait de la grève.
  11. 524. S’agissant du licenciement de 434 travailleurs dont 26 délégués du personnel par la société BCM SA à Loulo, le gouvernement indique que, suite à une grève observée par les travailleurs le 3 août 2012, l’entreprise a demandé, le 9 août 2012, au directeur régional du travail l’autorisation de licencier 434 travailleurs, dont des délégués syndicaux, pour arrêt de travail illégal. Après enquête, le directeur régional du travail a accordé son autorisation pour le licenciement des travailleurs concernés par lettre du 15 août 2012. Le 17 août 2012, l’entreprise a notifié à chacun des travailleurs concernés son licenciement.
  12. 525. Un collectif de délégués du personnel a saisi, le 23 août 2012, le directeur national du travail d’un recours hiérarchique en annulation de la décision du directeur régional du travail de Kayes. Après examen du cas, le 30 août 2012, le directeur national du travail a annulé la décision du directeur régional du travail. L’entreprise a alors introduit auprès de la Chambre sociale de la Cour suprême un recours en annulation de la décision du directeur national du travail pour excès de pouvoir. De leur côté, les travailleurs ont intenté une action en justice devant le tribunal du travail de Kita pour licenciement abusif. Le gouvernement déclare que la justice doit suivre son cours dans ce dossier.
  13. 526. En ce qui concerne le licenciement du secrétaire général du comité syndical des laboratoires ALS-MALI, le gouvernement indique que l’enquête contradictoire menée à la Direction régionale du travail du district de Bamako, en présence d’un représentant de la CSTM, a révélé que M. Yacouba Traoré a tenu des propos désobligeants à l’égard du directeur lorsque ce dernier lui a signifié ne plus pouvoir le recevoir sans rendez-vous préalable. Statuant sur l’affaire, le directeur régional du travail a donné son accord pour le licenciement, en estimant que le motif invoqué est bien fondé. Suite à son licenciement, M. Traoré a introduit un recours hiérarchique en annulation de la décision d’autorisation auprès du directeur national du travail. Ce dernier y a opposé une fin de non-recevoir par lettre du 13 septembre 2012.
  14. 527. S’agissant du dossier concernant les travailleurs victimes de plombémie, le gouvernement précise que le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique a mis en place une mission d’enquête composée de médecins de l’inspection de la santé, de la direction de la santé et de l’Institut national de recherche en santé publique. Selon le rapport de cette mission, les analyses sanguines effectuées ont effectivement révélé un taux de plomb supérieur à la normale chez certains travailleurs. Les experts ont ainsi fait des recommandations à l’endroit du laboratoire, et des recommandations ont été transmises au ministre du Travail. Par la suite, le directeur national du travail a adressé le 23 mai 2014 une lettre de mise en demeure au laboratoire pour qu’il se conforme aux règles légales en matière de santé et de sécurité au travail.
  15. 528. En conclusion, le gouvernement déclare que tous les services techniques du ministère du Travail ont toujours assumé leurs obligations dans la gestion du licenciement des travailleurs dans le secteur des mines. Ces derniers seraient au nombre de 502 et non de 531 comme allégué par l’organisation plaignante.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 529. Le comité note que le présent cas a trait à des licenciements massifs dans plusieurs entreprises du secteur minier. Selon la Confédération syndicale des travailleurs du Mali (CSTM), ces licenciements de travailleurs et de délégués syndicaux et du personnel font suite à des mouvements de grève et sont donc illégaux.
  2. 530. Le comité note que, de manière liminaire, l’organisation plaignante se réfère à une plainte qu’elle avait précédemment présentée (cas no 2756) en dénonçant le fait que les recommandations du comité n’aient pas été suivies d’effet. En outre, le comité prend note de la réponse du gouvernement. Le comité examinera ces éléments dans le cadre du suivi du cas no 2756.
  3. 531. Le comité note les allégations de l’organisation plaignante relatives aux licenciements massifs pour faits de grève intervenus dans le secteur des mines d’or en 2012. La CSTM précise que, parmi les 531 travailleurs licenciés, figurent de nombreux syndicalistes à l’origine des grèves en question. Ainsi, selon l’organisation plaignante, 11 syndicalistes ont été licenciés par la Société d’exploitation des mines d’or de Sadiola (SEMOS SA), 38 syndicalistes ont été licenciés de la société LTA-MALI SA, et 26 syndicalistes ont été licenciés par la société BCM SA à Loulo. L’organisation plaignante précise que les syndicalistes de la société SEMOS SA ont été licenciés sans l’accord de l’administration du travail, en violation des articles L.231 et L.277 du Code du travail du Mali alors que les mesures de licenciement touchant les 84 autres syndicalistes ont reçu l’accord préalable de l’administration. Le comité note que l’organisation plaignante conteste la légalité de ces licenciements de syndicalistes comme du licenciement des 436 travailleurs pour faits de grève.
  4. 532. L’organisation plaignante indique enfin que, conformément à la législation en vigueur, un conseil d’arbitrage a été constitué pour traiter la question des licenciements intervenus dans les sociétés SEMOS SA et LTA-MALI SA. Or le gouvernement serait incapable de faire appliquer la décision du 7 janvier 2013 du conseil d’arbitrage en faveur de la réintégration des travailleurs.
  5. 533. Le comité prend note de la réponse détaillée du gouvernement sur ces affaires. En ce qui concerne la société LTA-MALI SA, le gouvernement indique que, les 28 et 29 juin 2012, sans négociation préalable, le comité syndical de l’entreprise aurait organisé un mouvement de grève du personnel sous le prétexte de ne pas avoir été informé assez à l’avance de l’arrivée sur le site de l’inspecteur du travail, dépêché sur place le 18 juin 2012 par le directeur régional du travail pour une tentative de conciliation à laquelle les délégués du personnel ont refusé de participer. Suite à ce mouvement de grève, l’entreprise a demandé à la Direction régionale du travail l’autorisation de licencier 27 responsables syndicaux pour abus dans l’exercice du droit de grève et intention manifeste de nuire à l’entreprise. Les travailleurs concernés auraient été convoqués par le directeur régional du travail pour l’enquête réglementaire, mais ces derniers auraient refusé de se rendre à la convocation. En conséquence, l’inspecteur du travail a accordé l’autorisation de licenciement sollicitée.
  6. 534. En ce qui concerne la société SEMOS SA, le comité note que, suite à l’échec d’une tentative de conciliation, les responsables syndicaux de l’entreprise ont observé une grève de deux jours, les 31 mai et 1er juin 2012. L’entreprise aurait alors saisi l’inspection du travail d’une demande d’autorisation de licenciement de 14 syndicalistes pour incitation à une grève illégale. L’inspecteur du travail aurait cependant refusé d’autoriser les licenciements. L’entreprise aurait ainsi décidé de passer outre le refus de l’inspecteur du travail en licenciant les syndicalistes concernés en octobre 2012.
  7. 535. Le comité note l’indication du gouvernement selon laquelle le ministère du Travail a été interpelé à plusieurs occasions par la CSTM à propos du licenciement des responsables syndicaux, notamment pour réclamer la saisine d’un conseil d’arbitrage, en application de l’article L.225 du Code du travail. Le gouvernement précise que, selon le Code du travail, suite à l’échec d’une procédure de conciliation, le ministre chargé du travail peut saisir un conseil d’arbitrage. En application de ces dispositions légales, le ministère du Travail a constitué un conseil d’arbitrage par une décision du 28 septembre 2012. Le conseil a statué sur les réclamations des syndicalistes et a rendu sa sentence concernant les deux sociétés le 7 janvier 2013. Le comité note que le conseil a statué dans les termes suivants: sur les mesures de licenciement prises par la société LTA-MAL1 SA, «le conseil d’arbitrage a estimé que cette décision de licenciement ne violait en rien la légalité. Cependant, il reste évident que l’autorisation de licenciement délivrée par l’inspecteur du travail viole les articles L.231 et L.277 du Code du travail. En conséquence, le conseil d’arbitrage retient la faute de l’inspecteur du travail de Kayes et non celle de l’employeur.» Et concernant les licenciements opérés par la société SEMOS SA, «le conseil a estimé que ces licenciements ne rentraient pas dans le cadre de sa saisine et a décidé de s’en tenir à la mesure de suspension. En conséquence, il a ordonné la levée pure et simple par SEMOS SA de la mesure de suspension des 14 responsables syndicaux.»
  8. 536. De manière générale, le comité rappelle, en ce qui concerne l’exercice au niveau national du droit de grève, les principes suivants de la liberté syndicale internationalement reconnus: Nul ne devrait faire l’objet de sanctions pour avoir déclenché ou tenté de déclencher une grève légitime. Quand les syndicalistes ou les dirigeants syndicaux sont licenciés pour avoir exercé leur droit de grève, le comité ne peut s’empêcher de conclure qu’ils sont sanctionnés pour leur activité syndicale et font l’objet d’une discrimination antisyndicale. Cependant, les principes de la liberté syndicale ne protègent pas les abus dans l’exercice du droit de grève qui constituent des actions de caractère délictueux. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 660, 662 et 667.]
  9. 537. Dans le présent cas, le comité note que le gouvernement ne fournit pas d’information sur les suites données à la sentence arbitrale du 7 janvier 2013. Rappelant que plus de deux ans se sont écoulés depuis le prononcé de la sentence arbitrale, le comité s’attend à ce que les mesures adéquates aient été prises par les pouvoirs publics pour la faire appliquer et prie le gouvernement d’en faire état sans délai. Le comité, notant par ailleurs les indications sur les recours intentés devant le tribunal du travail de Kayes par des salariés de la société LTA-MALI SA et par la société SEMOS SA, prie le gouvernement de le tenir informé sans délai des décisions rendues dans ces affaires.
  10. 538. S’agissant du licenciement de 434 travailleurs dont 26 délégués du personnel par la société BCM SA à Loulo, le comité note l’indication du gouvernement selon laquelle, suite à une grève observée par les travailleurs le 3 août 2012, l’entreprise a demandé le 9 août 2012 au directeur régional du travail l’autorisation de licencier 434 travailleurs, dont des délégués syndicaux, pour arrêt de travail illégal. Après enquête, le directeur régional du Travail a accordé son autorisation pour le licenciement des travailleurs concernés par lettre du 15 août 2012. Le 17 août 2012, l’entreprise a notifié à chacun des travailleurs concernés son licenciement. Cependant, un collectif de délégués du personnel a saisi, le 23 août 2012, le directeur national du travail d’un recours hiérarchique en annulation de la décision du directeur régional du travail de Kayes. Après examen du cas, le 30 août 2012, le directeur national du travail a annulé la décision du directeur régional du travail. L’entreprise a alors introduit auprès de la Chambre sociale de la Cour suprême un recours en annulation de la décision du directeur national du travail pour excès de pouvoir. De leur côté, les travailleurs ont intenté une action en justice devant le tribunal du travail de Kita pour licenciement abusif. Notant que ces procédures sont encore en instance, le comité s’attend à ce que le gouvernement le tienne informé sans délai des résultats des différentes actions en justice, notamment de la décision de la Cour suprême, et des suites données.
  11. 539. Compte tenu du laps de temps écoulé depuis les mesures de licenciement, et dans la mesure où la décision de la Cour suprême serait en leur faveur, le comité s’attend à ce que les travailleurs licenciés pour faits de grève soient indemnisés pour le préjudice subi et pour éviter que des représailles à l’encontre de l’exercice au niveau national du droit de grève ne se reproduisent à l’avenir conformément aux principes de la liberté syndicale internationalement reconnus. Enfin, si la réintégration à leur poste de travail n’est pas possible pour des raisons objectives et impérieuses dûment constatées par l’autorité judiciaire, les travailleurs devraient être indemnisés intégralement.
  12. 540. Par ailleurs, le comité note les allégations de l’organisation plaignante relatives au licenciement de deux syndicalistes par les laboratoires Analytical Chemistry and Testing Service-Mali (ALS-MALI) pour avoir revendiqué des visites médicales pour l’ensemble des travailleurs. A cet égard, le comité a eu à rappeler que l’une des manières d’assurer la protection des délégués syndicaux est de prévoir que ces délégués ne peuvent être licenciés ni dans l’exercice de leurs fonctions ni pendant un certain laps de temps suivant la fin de leur mandat, sauf évidemment en cas de faute grave. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 804.]
  13. 541. Le comité observe que le gouvernement indique que l’enquête contradictoire menée à la Direction régionale du travail du district de Bamako, en présence d’un représentant de la CSTM, a révélé que le secrétaire général du comité syndical de l’entreprise, M. Yacouba Traoré, a tenu des propos désobligeants à l’égard du directeur lorsque ce dernier lui a signifié ne plus pouvoir le recevoir sans rendez-vous préalable. Statuant sur l’affaire, le directeur régional du travail a donné son accord pour le licenciement en estimant que le motif invoqué était bien fondé. Suite à son licenciement, M. Traoré a introduit un recours hiérarchique en annulation de la décision d’autorisation auprès du directeur national du travail. Ce dernier y a opposé une fin de non-recevoir par lettre du 13 septembre 2012. Le comité prend note de ces informations.
  14. 542. Le comité observe toutefois que la CSTM fait état, dans ses allégations, du licenciement de deux syndicalistes. En conséquence, le comité invite l’organisation plaignante à se rapprocher des autorités afin de fournir les informations sur le deuxième syndicaliste touché par une mesure de licenciement dans l’entreprise afin de permettre à l’administration du travail de procéder aux vérifications nécessaires. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 543. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité demande au Conseil d’administration d’approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité, rappelant que plus de dix-huit mois se sont écoulés depuis le prononcé de la sentence par le conseil d’arbitrage sur les licenciements intervenus dans les sociétés LTA-MALI SA et SEMOS SA, s’attend à ce que les mesures adéquates aient été prises par les pouvoirs publics pour la faire appliquer et prie le gouvernement d’en faire état sans délai. En outre, le comité prie le gouvernement de le tenir informé sans délai des décisions rendues suite aux recours intentés, de part et d’autres, devant le tribunal du travail de Kayes.
    • b) Le comité s’attend à ce que le gouvernement le tienne informé sans délai des résultats des différentes actions en justice intentées concernant les licenciements de 434 travailleurs par la société BCM SA, notamment de la décision de la Cour suprême, et des suites données.
    • c) Le comité observe que l’organisation plaignante fait état du licenciement de deux syndicalistes par la société ALS-MALI SA. Notant la réponse du gouvernement concernant la procédure suivie pour un dirigeant syndical, le comité invite l’organisation plaignante à se rapprocher des autorités afin de fournir les informations sur le deuxième syndicaliste touché par une mesure de licenciement dans l’entreprise afin de permettre à l’administration du travail de procéder aux vérifications nécessaires. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
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