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- 394. Dans une communication datée du 30 mars 1999, la Fédération des syndicats du Swaziland (SFTU) a présenté une plainte contre le gouvernement du Swaziland pour violations de la liberté syndicale.
- 395. Le gouvernement a répondu dans une communication datée du 2 mai 2000.
- 396. Le Swaziland a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante- 397. Dans sa communication du 30 mars 1999, la SFTU allègue que le gouvernement a violé les articles 2 et 3 de la convention no 87, les articles 1 et 2 de la convention no 98 ainsi que les articles 43, 47, 79 et 82 de la Loi sur les relations professionnelles no 1 de 1996.
- 398. Le plaignant affirme que chaque année, au mois de février ou mars, le gouvernement nomme un groupe de négociateurs pour le représenter dans les négociations collectives qui doivent se tenir avec toutes les associations du secteur public, telles l'Association des enseignants, l'Association des agents de la fonction publique et l'Association des infirmières.
- 399. Lors de la première journée de négociation, l'équipe gouvernementale a présenté une proposition, jugée très insuffisante par les associations, et les parties sont convenues de se séparer pour procéder à des consultations. A ce stade il n'y avait ni impasse ni différend déclaré entre les parties.
- 400. Le 17 mars 1999, le ministre de la Fonction publique et de l'Information a annoncé que, s'ils acceptaient l'offre gouvernementale sans consultation de leurs associations respectives, les fonctionnaires et les membres du personnel enseignant ou infirmier étaient tenus de signer un formulaire d'acceptation individuelle. L'offre en question était identique à celle qui avait motivé, d'un commun accord, le report des négociations évoquées plus haut. La plainte est assortie d'articles de journaux confirmant l'appel lancé par le ministre.
- 401. Le plaignant affirme que l'acte du ministre constitue une violation flagrante des conventions nos 87 et 98 et vise à marginaliser ou détruire le travail des syndicats au Swaziland.
- 402. Par la suite, le gouvernement a constamment utilisé les médias pour inviter les fonctionnaires à accepter son offre et signer l'attestation. Par ailleurs, il a également organisé, clandestinement, l'envoi d'une pétition signée par des fonctionnaires non affiliés à la SNACS (Association des agents de la fonction publique de l'Etat). Sur 11 000 fonctionnaires, seuls 91 ont signé la pétition, sur laquelle s'appuie le ministre pour justifier son action.
- 403. Les associations ont alors assigné le gouvernement devant les tribunaux, et la procédure suit actuellement son cours.
- 404. Par ailleurs, le plaignant allègue que le ministre des Entreprises et de l'Emploi a fait une déclaration publique (dont copie est jointe à la plainte) démontrant que le gouvernement n'entend pas tenir son engagement vis-à-vis de l'OIT s'agissant du projet de loi sur les relations professionnelles de 1998. Enfin, le plaignant allègue que le gouvernement continue à promulguer des lois et des ordonnances qui enfreignent les libertés fondamentales. La SFTU rappelle à titre d'exemple: la Loi sur les relations professionnelles de 1996 et le décret de 1973, qui ont fait l'objet d'une plainte précédente; le projet de loi portant création d'un conseil des médias, destiné à supprimer la liberté d'expression et les droits des journalistes; ainsi que le projet de loi sur les agents de la fonction publique visant à nier à tous ces derniers le droit de faire des déclarations à la presse.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 405. Dans sa communication du 2 mai 2000, le gouvernement déclare d'abord en ce qui concerne le projet de loi sur le Conseil des médias, que les allégations de l'organisation plaignante n'indiquent pas précisément quelles normes de l'OIT seraient violées par des dispositions spécifiques dudit projet, s'il était adopté par le Parlement dans sa teneur actuelle. Cette imprécision empêche le gouvernement de donner une réponse plus détaillée à la plainte.
- 406. S'agissant du projet de loi sur la fonction publique, le gouvernement indique que la plainte est manifestement dénuée de fondement puisqu'il n'existe pas de tel projet de loi.
- 407. En ce qui concerne la Loi de 1996 sur les relations professionnelles, le gouvernement rappelle que de nombreux débats ont déjà eu lieu sur l'incompatibilité éventuelle de cette loi avec certaines normes de l'OIT (voir cas no 1884). Le gouvernement n'est donc pas convaincu que cette question devrait faire l'objet d'une nouvelle plainte. Le libellé du nouveau projet de loi (no 13) sur les relations professionnelles reflète dans une certaine mesure les efforts accomplis pour aligner le régime de relations professionnelles sur les normes internationales du travail. Selon le gouvernement, il n'existe aucune raison de soulever de nouveau cette question dans une nouvelle plainte, comme si une nouvelle violation de ces normes s'était produite. Les recommandations du Comité de la liberté syndicale, tout comme celles de la commission d'experts, ont été prises en compte dans l'économie générale de la législation lors de l'adoption du projet de loi sur les relations professionnelles. D'importantes avancées ont été réalisées, le projet déjà approuvé par les deux chambres du Parlement n'attendant plus que la promulgation par le chef de l'Etat.
- 408. Le gouvernement indique par ailleurs avoir déjà répondu à la Commission sur l'application des normes que le décret de 1973 sur les réunions et manifestations n'avait jamais été censé s'appliquer aux travailleurs. Ce décret ne vise pas les travailleurs, point de droit que le Tribunal des relations professionnelles a clarifié dans l'affaire Swaziland Manufacturing and Allied Workers Union v. The Commissioner of Police. Le gouvernement rappelle en outre que le nouveau projet de loi sur les relations professionnelles a introduit de nouvelles dispositions qui clarifieront les malentendus concernant l'application des décrets de 1973 aux organisations syndicales.
- 409. S'agissant des allégations d'ingérence du gouvernement dans le processus de négociation collective avec les associations de la fonction publique, le gouvernement estime que cette question a été soumise prématurément au BIT. Si l'organisation plaignante avait attendu l'issue des poursuites judiciaires, elle n'aurait pas eu besoin de soulever cette question, qui a été tranchée une fois pour toutes par le tribunal compétent, dont le jugement lie le gouvernement (voir SNAT, SNACS & SNA vs. Swaziland Government, cas 67/99/IC). Le gouvernement y voit la preuve de la maturité et de l'indépendance du système de règlement des différends au Swaziland.
- 410. Le gouvernement conclut que le Swaziland a pris les mesures voulues pour dégager le nécessaire consensus, grâce à la participation tripartite, et que le projet de loi sur les relations professionnelles de 1998 est l'un des principaux fruits de cette coopération tripartite. Le BIT a sans aucun doute un rôle à jouer dans le renforcement de cette culture en fournissant l'appui technique nécessaire.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 411. Le comité note que le présent cas a trait à des allégations d'ingérence du gouvernement dans l'exercice du droit à la négociation collective et de violations continuelles des droits syndicaux, en droit comme en fait, au Swaziland.
- 412. En ce qui concerne les allégations d'ingérence dans le processus de négociation avec les associations de fonctionnaires formulées par suite de l'appel du ministre du Secteur public et de l'Information invitant individuellement les fonctionnaires à accepter les conditions proposées, et les tentatives de légitimation de cet appel par l'envoi d'une pétition alors que des négociations étaient en cours, le comité rappelle que le droit de négocier librement les conditions de travail avec les employeurs constitue un élément essentiel de la liberté syndicale et que les syndicats devraient avoir le droit, par le biais de négociations collectives ou par tout autre moyen légal, de chercher à améliorer les conditions de vie et de travail de ceux qu'ils représentent. De plus, tous les agents de la fonction publique, à l'exception de ceux qui sont commis à l'administration de l'Etat, devraient bénéficier du droit de négociation collective et une priorité devrait être accordée à la négociation collective comme moyen de règlement des différends survenant à propos de la détermination des conditions et modalités d'emploi dans le secteur public. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 782 et 793.) Le comité note que, dans le présent cas, les négociations ont eu lieu non seulement avec l'association des agents de la fonction publique mais aussi avec les associations des enseignants et des infirmières (qui en aucun cas ne peuvent être considérés comme des agents de la fonction publique commis à l'administration de l'Etat). Par ailleurs, la Loi sur les relations professionnelles du Swaziland (IRA) ne fait aucune distinction entre les différents types d'agents de la fonction publique aux fins d'une négociation collective et, dans cette même loi, la définition du terme "employeur" englobe le gouvernement.
- 413. Le comité observe qu'après un laps de temps apparemment très court après le début des négociations, le ministre de la Fonction publique et de l'Information, plutôt que de poursuivre les négociations ou de déclarer au commissaire du travail l'existence d'un différend, conformément aux procédures de règlement des différends prévues par la loi, a décidé de passer outre les syndicats reconnus et de s'adresser directement aux fonctionnaires. Etant donné l'absence apparente d'initiative gouvernementale visant à résoudre le problème avec les syndicats, tout en notant de la réponse du gouvernement que cette question a été tranchée par le tribunal compétent, le comité doit néanmoins conclure que les mesures prises par le ministre en l'espèce ne peuvent être considérées comme encourageant et promouvant la négociation collective. Le comité invite donc instamment le gouvernement à s'abstenir de prendre semblable mesure à l'avenir. De plus, le comité demande au gouvernement de lui faire parvenir un exemplaire du jugement mentionné dans sa réponse.
- 414. Pour ce qui est de l'allégation générale relative au non-respect par le gouvernement de son engagement d'adopter le projet de loi sur les relations professionnelles de 1998, et à l'élaboration de nouveaux projets de lois entravant la liberté et les droits des journalistes et des fonctionnaires, le comité note avec un profond regret que la loi sur les relations professionnelles de 1998 n'est, semble-t-il, pas encore entrée en vigueur. De fait, comme le gouvernement l'a lui-même rappelé, le comité avait constaté de nombreuses et profondes divergences entre la loi de 1996 sur les relations professionnelles et les dispositions des conventions nos 87 et 98. (Cas no 1884, rapport no 306, paragr. 619-705.) En juin 1998, le comité avait noté avec intérêt les efforts réalisés par le gouvernement, en consultation avec les partenaires sociaux et l'OIT, tendant à réviser la loi sur les relations professionnelles pour la rendre conforme aux principes de la liberté syndicale et il avait exhorté le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour que le projet de loi sur les relations professionnelles soit adopté dans un proche avenir. (Voir rapport no 310, paragr. 576-591.) Le comité observe maintenant, d'après la réponse du gouvernement, que même si les deux chambres du Parlement l'ont adopté, le projet de loi n'a toujours pas été promulgué par le chef de l'Etat.
- 415. Le comité doit donc rappeler que, dans la législation actuelle, les droits syndicaux, y compris les droits des fédérations, de faire grève et de réaliser des activités syndicales légitimes, sont interdits et que leur exercice peut entraîner des peines d'emprisonnement allant de un à cinq ans. Tout en notant la réponse du gouvernement, selon qui le décret de 1973 sur les réunions et démonstrations n'a jamais été destiné à s'appliquer aux travailleurs, le comité rappelle que, durant l'examen d'une plainte antérieure contre le Swaziland, il avait noté dans le rapport de la mission de contacts directs, en 1996, que le surintendant de la police avait invoqué l'article 12 de ce décret pour justifier la présence de policiers lors de réunions syndicales, afin de s'assurer qu'elles ne servaient pas de couverture pour des groupes politiques illégaux et interdits. En l'absence d'une protection législative appropriée, le comité doit donc réitérer sa conclusion antérieure, soit que l'article 12 du décret de 1973 menace gravement le droit des organisations de tenir des réunions et manifestations pacifiques. Le comité invite instamment de nouveau le gouvernement à prendre d'urgence les mesures nécessaires pour assurer l'entrée en vigueur rapide du projet de loi sur les relations professionnelles de 1998, de façon à garantir le plein respect des principes de la liberté syndicale. Le gouvernement est prié de tenir le comité informé de l'évolution dans ce domaine. S'agissant du projet de loi sur le Conseil des médias et des projets de loi relatifs aux agents de la fonction publique évoqués dans la plainte, le comité prend dûment note des renseignements fournis par le gouvernement et attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur cette question, ainsi que sur le statut du projet de loi sur les relations professionnelles.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 416. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Concluant que les actions du ministre, consistant à passer outre aux négociations en cours avec la fonction publique et à adresser un appel individuel aux fonctionnaires, ne sauraient être considérées comme encourageant et promouvant la négociation collective, le comité invite instamment le gouvernement à éviter de recourir à semblable action à l'avenir. Par ailleurs, le comité prie le gouvernement de lui envoyer copie du jugement sur le cas en question.
- b) Le comité invite instamment le gouvernement à prendre d'urgence les mesures nécessaires pour que le projet de loi sur les relations professionnelles entre en vigueur sans délai, de façon à garantir le plein respect des principes de la liberté syndicale. Le gouvernement est prié de tenir le comité informé de l'évolution de ces questions.
- c) En ce qui concerne le projet de loi portant création d'un conseil des médias, le projet de loi relatif aux agents de la fonction publique évoqués dans la plainte, ainsi que du projet de loi sur les relations professionnelles, le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur ces questions.