367. Les plaintes qui font l'objet des cas nos 1678 et 1695 figurent dans des communications de la Confédération des travailleurs Rerum Novarum (CTRN) datées des 30 septembre, 5 octobre 1992, 11 janvier, 1er et 6 mars 1993. Dans une communication en date du 4 juin 1993, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) s'est associée à ces plaintes.
- 367. Les plaintes qui font l'objet des cas nos 1678 et 1695 figurent dans des communications de la Confédération des travailleurs Rerum Novarum (CTRN) datées des 30 septembre, 5 octobre 1992, 11 janvier, 1er et 6 mars 1993. Dans une communication en date du 4 juin 1993, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) s'est associée à ces plaintes.
- 368. Dans des communications datées des 10 août 1993 et 4 mars 1994, respectivement, la CISL a fourni des informations complémentaires et de nouvelles allégations.
- 369. La plainte qui fait l'objet du cas no 1781 figure dans une communication du Syndicat des travailleurs de l'agriculture, de l'élevage et des branches connexes de Herédia (SITAGAH) datée du 8 juin 1994.
- 370. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications datées des 19 mai, 7 et 16 juin, 22 et 27 octobre 1993, 15 février, 17 mars, 26 et 27 avril, 20 septembre et 25 octobre 1994.
- 371. Le Costa Rica a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ainsi que la convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes
- (cas nos 1678 et 1695)
- 372 Dans la communication du 11 janvier 1993, les organisations plaignantes allèguent que le gouvernement, eu égard à la discrimination antisyndicale et au solidarisme, ne se conforme pas aux conventions nos 87 et 98 de l'OIT ni aux recommandations du Comité de la liberté syndicale sur le cas no 1483. S'agissant de l'immunité syndicale (fuero sindical), la CTRN signale que le gouvernement n'a pris aucune initiative législative en vue de la garantir, et qu'il n'a rien fait non plus en pratique pour protéger les travailleurs et leurs dirigeants contre la persécution antisyndicale dans les entreprises privées, maintenant l'inégalité de fait entre les syndicats et les autres organisations - non authentiques - de travailleurs, comme les associations solidaristes.
- 373 En ce qui concerne la négociation collective, les organisations plaignantes allèguent que le gouvernement ne favorise ni par la voie législative ni dans la pratique l'utilisation de mécanismes de négociation et de règlement des conflits du travail dans tous les secteurs, puisqu'en élargissant la notion de service public il empêche, dans une vaste catégorie d'entreprises, l'exercice des droits de négociation collective et de grève. Les organisations plaignantes ajoutent qu'à la demande de l'Institut de développement agricole (IDA) la quatrième Chambre constitutionnelle a rendu la décision no 1696-92 qui déclare inconstitutionnelles, pour manque de base légale, diverses dispositions du Code du travail relatives à la conciliation et à l'arbitrage en matière de conflits collectifs dans les administrations publiques, privant cette catégorie de travailleurs de la possibilité de saisir les tribunaux du travail pour le règlement de leurs conflits collectifs et ne leur laissant pas la faculté de recourir à la grève.
- 374 La CTRN déclare par ailleurs que la compagnie Líneas aéreas costarricenses SA (LACSA) ne s'est pas conformée, en septembre 1992, à la convention collective conclue avec l'Association professionnelle des pilotes aviateurs (APPA), en exigeant de ses pilotes qu'ils accomplissent un nombre d'heures de vol supérieur à celui convenu. Devant le refus d'obtempérer des intéressés, LACSA a suspendu ses vols et, sans que les pilotes se soient déclarés en grève, a informé le tribunal civil d'Alajuela que, les pilotes s'étant mis en grève, elle ne disposait plus d'équipages, et lui a demandé de déclarer cette grève illégale, ce à quoi le tribunal a accédé. LACSA a licencié les prétendus grévistes, a engagé des pilotes étrangers et, par l'intermédiaire de la compagnie Aeroser, a sous-traité les services de certains des pilotes licenciés, en violation de la convention collective signée avec l'APPA déniant par là même aux pilotes les avantages qu'ils avaient acquis. L'APPA a introduit un recours devant la Chambre constitutionnelle.
- 375 Dans sa communication du 30 septembre 1992, la CTRN fait valoir que l'entreprise Talmana SA, dans la province de Puntarenas, a licencié dix travailleurs au motif qu'ils avaient adhéré à l'Association nationale des travailleurs des entreprises privées (ANTEP): il s'agit de Luis Villalobos Cortés, Antonio Boniche Alvarez, Alexis Cruz Calvo, Filadelfo López Guardado, Victor Manuel Naranjo González, José Didier Araya Núñez, Miguel Barrantes Mendoza, José René Díaz Trejos, Juan Luis Benavides Gutiérrez et Lucia Campos González. Les plaignants indiquent qu'à la suite du recours introduit par l'ANTEP devant la Chambre constitutionnelle celle-ci a ordonné la suspension des mesures contestées par le syndicat et la réintégration des travailleurs licenciés. A ce jour, l'entreprise n'a toutefois pas encore obtempéré.
- 376 Par ailleurs, les plaignants déclarent dans leurs allégations que le gouvernement a fait adopter de nouvelles lois et a soumis à l'Assemblée législative des projets de loi contraires à la liberté syndicale et à la stabilité des relations professionnelles. C'est ainsi que:
- - un projet de loi de démocratisation du secteur public, qui n'a pas encore été voté par l'Assemblée législative, prévoit la suppression de 25 000 postes de travail;
- - la loi générale sur la concession de travaux publics, déjà approuvée par l'Assemblée législative, vise à démanteler l'un des ministères les plus importants et les mieux dotés en effectifs;
- - un projet de loi portant création du Conseil national portuaire, déposé devant l'Assemblée législative, interdit aux travailleurs du conseil de recourir à la grève ou de cesser, totalement ou partiellement, de travailler (art. 51);
- - la loi sur le règlement des conflits collectifs dans la fonction publique, qui a déjà reçu l'avis favorable de la commission législative et doit être approuvée en séance plénière, prévoit des mécanismes de négociation complexes et difficiles qui la rendent pratiquement inapplicable.
- 377 Dans leurs communications des 6 mars et 4 juin 1993, la CTRN et la CISL allèguent que des responsables du ministère de l'Education et de la Direction de la fonction publique ont refusé une autorisation d'absence sans traitement pour activités syndicales octroyée jusque-là au professeur Mario Rojas Vilchez, secrétaire à la sécurité sociale de la CTRN, alléguant que ce dernier n'avait pas accompli la période de stage réglementaire au centre d'enseignement "El Concho de San Carlos", et qu'il devait par conséquent, selon ces responsables, rejoindre ledit établissement. Les plaignants affirment que cet argument est dénué de tout fondement légal, M. Rojas Vilchez ayant exercé pendant six ans dans le centre en question après avoir été titularisé.
- 378 Dans une communication datée du 10 août 1993, la CISL fait état des mesures de représailles antisyndicales suivantes commises dans diverses entreprises du secteur privé:
- - l'entreprise Confecciones Imperio SA a licencié des travailleurs affiliés au syndicat (Narvin Mata Sequeira, Marjorie Mata Sequeira et Alejandro Morux Briseño) parce qu'ils avaient refusé d'adhérer à une organisation de travailleurs solidariste. Le ministère du Travail étant intervenu, l'entreprise a indemnisé les travailleurs licenciés mais n'a pas procédé à leur réintégration, et ceux-ci n'ont pu qu'accepter la proposition de la direction. Malgré cette mesure de conciliation, l'entreprise continue de harceler les travailleurs pour qu'ils quittent le syndicat, leur offrant en échange une série de prestations par le biais des associations solidaristes, ce qui a entraîné une baisse considérable des effectifs du syndicat;
- - l'entreprise Corporación Peter SA a licencié les travailleurs suivants, en raison de leur affiliation au syndicat, après leur avoir versé les indemnités correspondantes: Carlos Corrales Arce, Jorge Castro Ugalde, Manuel Acosta Araya, Geiner Cubero Cubero, Rubén Arias Castro, Gerardo Molina Carballo, Adilio Pérez Vargas, Gerardo Ramírez Ledezma, Benigno Múñoz Solórzano, Javier Arguedas Badilla et Francisco Rojas Quesada;
- - l'entreprise Patisand SA a licencié Elizabeth Salas Rodríguez, une représentante syndicale, sans lui verser les indemnités correspondantes;
- - depuis octobre 1993, l'entreprise Corporación Rojas Cortés SA procède à une série de persécutions à l'encontre des travailleurs affiliés pour la plupart au syndicat, en opérant des licenciements et en se livrant à des intimidations afin qu'ils se retirent du syndicat;
- - la Compañía Bananera Agropecuaria Río Jiménez SA a licencié deux travailleurs (Luis Alvarado Bertarioni et Gil Contreras Moraga) pour avoir signé des pétitions;
- - l'entreprise Industrias Realtex SA a procédé, en novembre 1992, à un licenciement massif de travailleurs et de membres de la filiale syndicale, qui avaient pris part à une réunion pour exposer à la direction des problèmes relatifs au travail. Le ministère du Travail a été saisi, mais à ce jour aucune enquête n'a été ouverte.
- 379 Dans sa communication datée du 4 mars 1994, la CISL a envoyé une annexe intitulée "Rapport sur la situation des droits syndicaux au Costa Rica" signée par M. Mario A. Blanco Vado, de l'Association nationale des salariés de la fonction publique. Ce rapport signale que la loi no 7360 du 12 novembre 1993 dispose que "les syndicats ne pourront entreprendre des activités propres aux associations solidaristes ni aux associations coopératives"; il prétend ignorer le compromis gouvernemental permettant aux organisations syndicales de participer à l'administration des fonds d'indemnisation des travailleurs (provenant des cotisations relatives aux indemnités de licenciement), ce qui est contraire à la convention no 87. Il limite gravement le contenu de la négociation collective; le projet qui visait à trouver une solution à la question, et qui avait été envoyé au Service du droit du travail et des relations professionnelles du BIT, a été remplacé durant la procédure législative du mois de février 1994 par une version qui maintient l'inégalité entre les syndicats et les associations solidaristes. De plus, la nouvelle loi prévoit que les organisations syndicales pourront être dissoutes si elles se livrent à de telles activités. Le changement opéré par la loi susmentionnée n'a pas été porté à la connaissance des organisations syndicales avant son adoption, pas plus qu'il n'a été consulté lors de l'élaboration du texte soumis au Service du droit du travail et des relations professionnelles du BIT.
- 380 De même, d'après le rapport de la CISL, la nouvelle loi constitue un progrès important en matière de discrimination antisyndicale mais ne résout pas pour autant expressément et formellement le problème du licenciement des travailleurs syndiqués sur simple décision patronale (art. 85 du Code du travail), une fois écoulé le délai de six mois à partir de la création du syndicat.
- 381 De même, la protection des personnes exerçant un mandat syndical est limitée puisqu'elle ne s'applique qu'à une personne pour les vingt premiers membres syndiqués et à une autre personne pour chaque tranche de 25 adhérents avec un maximum de quatre représentants. Ceci revient à une application partielle de la protection qui devrait être fondée non pas sur le nombre de membres syndicaux, mais sur la qualité de représentant des travailleurs conformément aux conventions pertinentes. L'obligation du gouvernement à cet égard n'est toujours pas remplie en ce qui concerne les étapes postérieures à la création de l'organisation de travailleurs et le nombre final de représentants bénéficiant d'une protection.
- 382 S'agissant des amendements à l'exercice du droit de grève que la commission d'experts a demandés au gouvernement, l'article 378 du Code du travail, qui limite le droit de grève, reste en vigueur sans modification. Le gouvernement a réussi à donner la fausse impression qu'une loi sur l'emploi dans les services publics pourrait changer la situation décrite plus haut et donc répondre aux exigences formulées par la commission. Cette situation n'est pas réaliste. La loi sur l'emploi dans les services publics n'aurait d'incidence que sur les restrictions actuelles imposées aux agents de l'Etat qui ne peuvent exercer le droit de grève, mais elle n'en aurait pas sur les autres activités qui, bien que n'appartenant pas à la fonction publique, entrent dans la large dénomination de services publics en vertu de la législation en vigueur. Même dans l'hypothèse improbable où cette loi sur l'emploi dans les services publics serait adoptée à brève échéance, la législation du Costa Rica resterait incompatible avec les conventions internationales car elle restreint l'exercice de la grève ayant recours à une définition qui non seulement est différente, mais encore beaucoup plus large que la définition universellement acceptée des seuls services publics essentiels dans lesquels le droit de grève ne peut être exercé.
- 383 Les dispositions relatives à l'exclusion du droit de grève dans la législation du Costa Rica font qu'il est nécessaire d'introduire un amendement spécifique à la loi ordinaire susmentionnée, ce que le gouvernement n'a pas proposé malgré des demandes répétées dans ce sens. L'agriculture et le transport, pour ne citer que quelques branches d'activité, restent encore définis par la législation en vigueur comme appartenant aux services publics dans lesquels la grève peut être interdite, même s'il ne s'agit pas d'activités de l'Etat. Ainsi, la question n'a pas été traitée ni même abordée dans un projet de loi au niveau national.
- 384 En ce qui concerne la négociation collective dans l'administration publique, le gouvernement a entamé il y a plusieurs années des discussions avec le mouvement syndical au sujet d'une éventuelle loi sur l'emploi dans les services publics. En cherchant à satisfaire la nécessité pour le gouvernement d'adopter une approche administrative plus ferme du régime juridique de l'emploi dans l'administration publique, on prétendait aussi créer de nouvelles règles concernant la négociation collective et l'exercice du droit de grève dans ce secteur. Le projet de loi a été largement diffusé à l'échelon international et le gouvernement l'a même communiqué au Service du droit du travail et des relations professionnelles du BIT. Ces négociations sont encore en cours et n'ont pas encore abouti. Le projet de loi proposé n'a donc toujours pas été présenté à l'organe législatif malgré l'engagement formel du gouvernement de présenter le texte le 1er mars 1994. En dépit des efforts déployés par le mouvement syndical pour obtenir une législation régissant de manière appropriée la négociation collective et le droit de grève dans l'administration publique, la situation est encore au point mort.
- 385 Par ailleurs, bien que les articles 333 et 334 du Code pénal aient été abrogés et que l'exercice du droit de grève des agents de la fonction publique et l'incitation à cesser collectivement le travail dans les services publics aient été dépénalisés, cela ne signifie pas que des restrictions au droit de grève n'existent plus. Bien au contraire, quoiqu'il n'existe plus de sanctions pénales spécifiques, la grève reste interdite pour tous les agents de l'Etat et en général pour les services publics, selon la définition insuffisante qu'en donne la législation en vigueur. En ce sens, les employeurs continuent à utiliser le licenciement comme sanction et continueront à le faire tant que des dispositions spécifiques ne seront pas adoptées pour rendre les normes nationales compatibles avec celles de la convention no 87.
- 386 Dans sa communication du 28 juin 1994, la CISL allègue que les 19 et 21 avril 1994 un millier de travailleurs des bananeraies de l'entreprise Geest Caribbean Americas Ltda. se sont mis en grève pour protester contre une réduction massive et arbitraire des salaires décidée par l'entreprise au début du mois. Suite à cette action directe et à des négociations organisées entre l'entreprise et le SITAGAH, les travailleurs représentants de la Geest, les grévistes ont repris le travail et l'entreprise s'est engagée à ne pas licencier les grévistes et à discuter d'une augmentation de salaires. Néanmoins, l'entreprise n'a pas tenu sa promesse et elle a licencié 400 travailleurs permanents et 200 travailleurs temporaires nicaraguayens dont les conditions de travail étaient inférieures en raison de leurs conditions d'émigrants et qui n'avaient pas les moyens financiers de retourner chez eux. Le 7 mai 1994, les travailleurs ont déclenché une grève illimitée pour les raisons suivantes: a) non-respect par l'entreprise de l'engagement conclu après la grève d'avril; b) rejet par les travailleurs des conditions imposant de longues journées de travail (certains d'entre eux doivent travailler jusqu'à treize heures par jour) et réductions de salaires. Par ailleurs, les travailleurs doivent utiliser des produits chimiques agricoles sans la protection nécessaire, et les femmes sont victimes de harcèlement sexuel sur le lieu de travail; c) exigence formulée par l'entreprise de ne négocier qu'avec le comité permanent de travailleurs qu'elle a constitué elle-même en excluant la participation de l'ensemble des travailleurs. D'après certaines informations, l'entreprise a négocié avec ce comité une réduction de salaire de 2 000 colons par hectare (pratiquement 12 dollars).
- 387 La CISL précise que l'entreprise a pris les mesures suivantes à l'encontre des travailleurs:
- - obstacle aux formalités de migration qui permettraient aux travailleurs nicaraguayens de régulariser leur situation sur le plan de la résidence et d'accéder aux procédures normales au Costa Rica;
- - licenciement des travailleurs migrants qui ont adhéré aux syndicats costariciens et constitution de listes de noms de tous les travailleurs aux autres employeurs pour les prévenir de ne pas les employer; et
- - appel aux forces de sécurité pour bloquer des routes d'accès à la zone de Sarapiquí où les travailleurs en grève s'étaient regroupés, prévenant ainsi tout contact entre les travailleurs et le public en général.
- 388 Le 13 mai, les forces de sécurité, armées de fusils M-16, ont fait feu sur les travailleurs et les ont délogés violemment des barricades qu'ils avaient installées à Sarapiquí. Certains travailleurs ont été blessés et d'autres arrêtés. A la suite des protestations de certaines organisations internationales et d'organisations de droits de l'homme au Costa Rica, les travailleurs ont été relâchés et la compagnie Geest a fait preuve de bonne volonté en vue de reconnaître le SITAGAH et en entamant immédiatement des discussions.
B. Allégations de l'organisation plaignante
B. Allégations de l'organisation plaignante
- (cas no 1781)
- 389 Dans sa communication datée du 8 juin 1994, le Syndicat des travailleurs de l'agriculture, de l'élevage et des secteurs connexes (SITAGAH) a également évoqué les événements mentionnés dans les allégations de la CISL dans ses communications datées du 28 juin 1994 (cas no 1695). Le syndicat explique que, depuis 1990, ont été créées dans le district central du canton de Sarapiquí (province de Herédia, République du Costa Rica) des plantations de bananes appartenant à une multinationale de commercialisation à capitaux anglais, la Geest Caribbean Americas Ltda., branche du Costa Rica. Cette compagnie emploie 1 100 travailleurs agricoles, dont environ 900 sont directement recrutés par l'employeur et le reste étant en sous-traitance.
- 390 Le SITAGAH allègue que la compagnie Geest Caribbean Americas Ltda. emploie depuis 1990 directement ou en sous-traitance de nombreux travailleurs migrants nicaraguayens sans papiers d'identité auxquels ne sont pas reconnus les droits du travail du Costa Rica et qui sont en outre utilisés comme main-d'oeuvre de réserve pour obliger les travailleurs de la banane de nationalité costaricienne d'accepter des conditions de travail, de sécurité et de salaire inférieures à celles qui ont cours au Costa Rica. Les mesures arbitraires de cet employeur ont conduit les travailleurs à contacter les dirigeants syndicaux du SITAGAH en septembre 1993, et des centaines d'entre eux s'y sont affiliés, mais l'entreprise a réprimé le syndicat et l'a empêché de fonctionner par divers moyens: licenciement de travailleurs affiliés au syndicat et de représentants syndicaux élus; pratiques discriminatoires en matière de salaires et de conditions de travail; pratiques déloyales à l'encontre du SITAGAH; annulation de la liberté des dirigeants syndicaux de rencontrer les travailleurs sans l'autorisation préalable de l'employeur; encouragement à l'ingérence solidariste dans les questions syndicales et recours à la violence (par l'intermédiaire d'une police privée pour empêcher la syndicalisation) et enfin répression armée (des travailleurs ont été blessés et battus par ces forces de police) pour briser la grève légitime des travailleurs.
- 391 Le SITAGAH ajoute que depuis septembre 1993 il a demandé sa reconnaissance et la solution des problèmes rencontrés par ses membres dans le cadre de leur travail. Bien qu'il ait officiellement reconnu le syndicat SITAGAH, l'employeur n'a pas cessé de porter toutes les questions de travail devant les comités permanents affiliés aux associations solidaristes, en refusant d'en discuter avec le SITAGAH.
- 392 En avril 1994, l'employeur a pris des mesures arbitraires allant jusqu'à réduire les salaires des travailleurs de plus de 6 000 colons par quinzaine, ce qui a provoqué une grève de trois jours (19, 20 et 21 avril 1994) à la suite de quoi l'employeur s'est engagé à négocier les problèmes de salaires avec le SITAGAH sur la base d'un ordre du jour établi par le syndicat. Néanmoins, l'employeur bien loin de prendre place à la table des négociations a au contraire licencié massivement les travailleurs appartenant au syndicat et chassé de la plantation les travailleurs en sous-traitance. L'entreprise a immédiatement appelé les autorités du service des migrations pour que les travailleurs migrants sans papiers d'identité et qui s'étaient affiliés au syndicat soient expulsés du pays. Cette situation a obligé les travailleurs à lancer une nouvelle grève le 7 mai 1994 et à maintenir le mouvement jusqu'au 21 mai. Cependant, le 18 mai, en utilisant comme excuse une décision du tribunal de dégager la voie publique, la police costaricienne, soutenue par des gardes privés de la compagnie Geest Caribbean, a attaqué les grévistes sur les ordres du représentant de l'employeur et 18 d'entre eux ont été blessés par balles dont trois sérieusement; certains d'entre eux ne pourront plus jamais récupérer leur capacité de travail et 35 personnes ont été incarcérées; à ce jour, deux travailleurs sont encore portés disparus. Il convient de souligner que les travailleurs étaient en grève pacifique et légale compte tenu des actes arbitraires de l'employeur ainsi que de la légalité et de la légitimité des revendications des travailleurs. L'entreprise a cependant licencié plus de 60 travailleurs violant ainsi l'immunité syndicale à laquelle ils avaient droit, car parmi les travailleurs licenciés il y avait deux représentants élus par les travailleurs aux comités permanents, au comité de négociation qui examinait les problèmes de travail sur la plantation avec le gouvernement et l'entreprise, aux comités de la base syndicale ainsi que des membres du comité exécutif du syndicat.
- 393 Par ailleurs, le SITAGAH fait remarquer que si le problème n'a pas été résolu et si le SITAGAH dispose d'un nombre important de membres parmi les travailleurs, il n'en reste pas moins que l'employeur empêche les dirigeants syndicaux de rencontrer librement les travailleurs en ayant recours à des gardes privés pour leur interdire l'accès à des plantations et empêche aussi les travailleurs d'organiser des réunions et de communiquer avec des personnes étrangères à la plantation. Comme l'ont déclaré les travailleurs eux-mêmes, la plantation de Sarapiquí de la Geest Caribbean est un camp de concentration fleuri, où les dirigeants syndicaux doivent demander la permission à l'employeur rien que pour parler avec les membres et ne peuvent communiquer avec les autres travailleurs ou organiser des réunions syndicales. Le SITAGAH joint un mémorandum émanant du directeur de la plantation de bananes écrit et signé de sa propre main et adressé aux gardes privés dans lequel il déclare textuellement: "Autorisation, M. Pablo Zuñiga peut parler avec les militants syndicaux". Malgré cela, les gardes privés ont assisté aux conversations et les travailleurs n'ont pas pu s'exprimer librement.
- 394 Dans l'intervalle, l'entreprise et l'organe consultatif du mouvement solidariste de l'industrie bananière du Costa Rica, l'Ecole sociale Jean XXIII, se sont en quelque sorte ingérés dans le conflit du travail en faisant pression sur les travailleurs pour qu'ils adhèrent à l'association solidariste et en constituant quatre associations solidaristes qui ont été homologuées par le ministre du Travail sans enquête sur la légalité de leur origine.
- 395 D'après les plaignants, le gouvernement du Costa Rica a adopté une loi sur l'immunité syndicale mais, dans la pratique, elle n'est pas appliquée. La Chambre constitutionnelle a consacré la légitimité de l'immunité syndicale mais en pratique aucun organe judiciaire ou administratif de l'Etat ne l'applique. La législation approuvée par l'Etat interdit aux associations solidaristes de s'ingérer dans la négociation collective ou d'agir à l'encontre des syndicats. Le ministre du Travail et de la Sécurité sociale continue néanmoins d'homologuer les associations solidaristes constituées pour nuire aux syndicats et d'homologuer les négociations collectives que l'employeur mène avec les comités permanents d'origine solidariste, en excluant de ce fait le syndicat de la négociation. Dans le cas précis mentionné dans cette allégation, l'employeur a constitué quatre associations solidaristes et négocie la rémunération des travailleurs avec le comité permanent.
- 396 La première mesure concernant le travail prise par l'actuel gouvernement a été de tirer sur les travailleurs de la compagnie Geest Caribbean Americas qui s'étaient légalement mis en grève et de les licencier.
C. Réponse du gouvernement
C. Réponse du gouvernement
- 397. Dans ses communications des 19 mai, 22 et 27 octobre 1993, le gouvernement déclare que les allégations générales relatives à ces cas correspondent pour l'essentiel aux points traités dans le cas no 1483 par le Comité de la liberté syndicale ainsi que dans les dernières observations de la commission d'experts, et qu'elles ont fait l'objet d'une mission de contacts directs effectuée dans le pays du 4 au 8 octobre 1993. Le gouvernement souligne que l'administration actuelle s'est attachée tout particulièrement à adapter la législation du travail aux principes énoncés dans les conventions nos 87, 98 et 135; c'est ainsi qu'elle a instauré un cadre juridique spécialement conçu pour protéger les organisations syndicales et leurs dirigeants, et soumis divers projets de lois prenant en compte, avec l'assistance technique du BIT, les recommandations du Comité de la liberté syndicale contenues dans le 278e rapport, ainsi que celles de la commission d'experts. Le gouvernement se réfère en particulier à une loi récente, du 27 octobre 1993, portant modification, entre autres, du Code du travail (en ce qui touche les garanties syndicales) et de la loi sur les associations solidaristes, en les adaptant aux dispositions des conventions susmentionnées. Le gouvernement ajoute qu'il est faux de dire qu'il cherche à parler d'inégalité entre le solidarisme et le syndicalisme; au contraire, se fondant sur les recommandations susmentionnées du comité, il a soumis à l'Assemblée législative le projet de loi portant création d'un fonds d'indemnisation du chômage et de démocratisation économique, qui transforme le régime juridique du fonds de chômage, l'érigeant en droit réel pour tous les travailleurs et mettant les syndicats et les associations solidaristes sur un pied d'égalité pour ce qui est de la possibilité de se constituer administrateur de ces fonds. De même, la loi du 27 octobre 1993 ramène à 12 le nombre minimum de travailleurs requis pour constituer un syndicat (le même nombre que celui qui est exigé pour la constitution d'une association solidariste), instaure une protection adéquate contre les actes de discrimination antisyndicale et actualise les amendes pour infraction au Code du travail et aux conventions de l'OIT.
- 398. En ce qui concerne l'allégation relative aux limitations imposées à la négociation collective et à la grève dans le secteur public, le gouvernement indique que, depuis le début de 1992, il négocie avec les organisations syndicales (y compris l'organisation plaignante) un texte de loi spécifique sur l'emploi dans les services publics destiné à régir expressément le règlement des conflits collectifs et le droit de grève dans ce secteur. Au sujet de la décision no 1696-92 de la quatrième Chambre constitutionnelle, le gouvernement signale que, conformément aux principes constitutionnels en vigueur, la relation de travail entre l'administration publique et ses agents répond à des "critères propres ou particuliers" qui ne permettent pas d'appliquer les lois du travail relatives à l'arbitrage, celles-ci ayant été exclusivement conçues pour les relations de travail dans le secteur privé. Le gouvernement ajoute que, la décision précitée interdisant aux travailleurs du secteur public l'accès aux commissions d'arbitrage, il a émis le 5 mars 1993, après en avoir débattu avec le Conseil supérieur du travail (un organe tripartite), le règlement de la négociation collective par les agents de la fonction publique, afin de permettre la négociation collective et l'application des droits syndicaux dans l'administration publique. Ce règlement demeure provisoirement en vigueur en attendant que soit promulguée la loi correspondante; en effet, un projet de loi sur le règlement des conflits collectifs dans le secteur public, qui s'inscrit dans le cadre du projet de loi sur l'emploi dans les services publics et que le BIT a eu l'occasion de commenter, va être soumis à l'Assemblée législative - il est le fruit de consultations tripartites.
- 399. En ce qui concerne les allégations relatives aux nouvelles lois et aux projets de loi prétendument contraires au principe de la liberté syndicale et nuisibles à la stabilité du travail, le gouvernement indique, dans sa communication du 7 juin 1993, que les listes d'annexes envoyées par les organisations plaignantes se réfèrent à des extraits de textes de lois et de projets de loi, ainsi qu'à des articles de revues reflétant des positions doctrinaires; c'est pourquoi il est matériellement impossible au gouvernement de formuler des commentaires, car il devrait pour cela commencer par procéder à une analyse juridique fondée sur une argumentation, ce qui serait totalement hors de propos dans le présent contexte.
- 400. Quant au refus d'accorder à M. Mario Rojas Vilchez, dirigeant syndical, un congé sans traitement pour activités syndicales, le gouvernement déclare que ce refus s'explique par le fait que M. Rojas Vilchez n'est pas un fonctionnaire titulaire puisqu'il n'a pas encore effectué sa période d'essai, condition requise par l'article 20 du Statut de la fonction publique. Le gouvernement indique, par ailleurs, qu'il est disposé à modifier la loi sur la carrière dans l'enseignement de façon à permettre aux enseignants exerçant dans le secteur public en particulier, et aux agents de la fonction publique en général, de bénéficier sans restrictions de congés pour activités syndicales, en alignant pour cela les dispositions législatives sur celles de la convention no 135. Cette modification sera soumise pour approbation au Conseil supérieur du travail, un organe tripartite.
- 401. Eu égard à l'allégation relative à la persécution antisyndicale dans diverses entreprises du secteur privé, le gouvernement, dans sa communication du 22 octobre 1993, fournit les indications suivantes:
- - A l'entreprise Confecciones Imperio SA: la CTRN a sollicité auprès du ministère du Travail une comparution afin que les représentants des travailleurs puissent régler avec l'entreprise certains cas de licenciements injustifiés, présentés comme des mesures de rétorsion prises à l'encontre de travailleurs membres de l'Association nationale des travailleurs des entreprises privées (ANTEP) qui auraient refusé de s'affilier à une association solidariste. Lors de la comparution, qui a eu lieu le 14 juillet 1992, les parties sont parvenues à un accord satisfaisant, les travailleurs licenciés ayant accepté le versement des indemnités correspondantes en lieu et place d'une réintégration.
- Le gouvernement réfute les informations relatives à l'allégation de persécution antisyndicale dans l'entreprise susmentionnée étant donné que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, par l'intermédiaire de la Direction nationale de l'inspection du travail, et la Direction nationale des relations professionnelles n'ont enregistré aucune plainte pas plus qu'il n'y a eu, par la voie appropriée ou par toute autre voie, de preuve manifeste d'une telle persécution.
- Néanmoins, mention particulière devrait être faite de l'intervention effective du ministère par l'intermédiaire de son Département des relations professionnelles au moment des licenciements allégués et du règlement favorable qui a suivi et grâce auquel une compensation a pu être versée, et des minutes de la réunion montrant qu'aucune réserve laissant entendre qu'il y avait eu persécution n'a été formulée par le syndicat.
- - A l'entreprise Talmana SA: la plainte déposée par le président de l'ANTEP pour persécution antisyndicale à l'endroit d'un certain nombre de travailleurs a été déclarée recevable par l'inspecteur du travail, qui a décidé d'engager la procédure judiciaire correspondante pour violation de la législation du travail. Le 7 juin 1993, le plaignant auteur du recours en amparo a demandé le désistement d'action et l'abandon de son recours, aussi l'inspection du travail a-t-elle classé l'affaire. Par la suite, en raison de conflits internes au syndicat, l'assemblée des travailleurs a destitué le président de l'ANTEP, et le nouveau représentant a demandé la poursuite de la procédure, demande à laquelle l'inspection du travail a accédé; les nouvelles allégations font actuellement l'objet d'investigations.
- A cet égard, il importe au plus haut point de souligner que la Direction nationale de l'inspection du travail a décidé le 25 février 1993 de déclarer admissible la plainte pour persécution antisyndicale formulée à l'encontre de la société Talmana SA par M. Carlos Acuña Castro, président de l'Association nationale des travailleurs des entreprises privées (ANTEP). Ceci montre clairement que le gouvernement du Costa Rica est entièrement disposé à enquêter sur la plainte des organisations syndicales en violation de la législation du travail qui protège les activités syndicales.
- Cependant, comme le prévoit la loi et l'autorise le système juridique, l'avocat de l'entreprise Talmana SA a fait appel contre cette décision. Cette décision n'est pas définitive, étant donné qu'elle a été contestée par l'Association nationale des travailleurs des entreprises privées (ANTEP) qui a aussi fait appel pour la protection constitutionnelle (amparo) contre l'entreprise. Actuellement, il n'est pas démontré que le ministère a eu une participation quasiment nulle dans le cas susmentionné, étant donné qu'il est allé aussi loin que le permet le système juridique et qu'il n'y a pas de preuve d'omission volontaire ni de violation des dispositions légales.
- - A l'entreprise Corporación Peter SA: aucune plainte n'ayant été adressée à l'inspection du travail pour violation de la liberté syndicale dans cette entreprise, il est étonnant qu'avant de recourir aux organes compétents du pays la plainte ait été adressée au comité.
- - A l'entreprise Patisand SA: lors de l'inspection qui a été conduite dans cette entreprise, il s'est avéré qu'Elizabeth Salas, employée de l'entreprise, avait été licenciée pendant sa période d'allaitement, ce qui constitue une violation de la législation du travail. C'est ce chef d'accusation qui a été invoqué devant le tribunal du travail. Il n'a pas été démontré que le motif du licenciement était une persécution antisyndicale, mais bien qu'il s'agissait du motif indiqué.
- En examinant le cas en détail, l'allégation est répétitive et dénuée de fondement car le cas a déjà été porté à la connaissance des services de l'inspection du travail qui ont déjà poursuivi l'entreprise Patisand SA devant les tribunaux pour violation de la législation du travail et de la sécurité sociale.
- Il a été démontré que l'entreprise en question n'avait pas respecté l'article 94 du Code du travail, étant donné que, malgré le fait que la travailleuse allaitait son enfant à l'époque, elle n'avait pas notifié le licenciement à la Direction nationale et à l'inspection générale du travail afin de faire valoir la faute imputée comme motif de licenciement justifié conformément au Code du travail.
- - A l'entreprise Corporación Rojas Cortés SA: à l'issue des enquêtes menées par l'inspection du travail dans les diverses propriétés faisant partie de l'entreprise, la plainte a été déclarée sans objet, et cette décision est définitive puisqu'elle n'a pas été contestée par les intéressés.
- Plus précisément, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, par l'intermédiaire des services de l'inspection du travail et des affaires du travail, a examiné toutes les demandes d'aide pour établir les violations des diverses dispositions légales, y compris les allégations de persécution antisyndicale. Les dernières allégations ont été abandonnées étant donné qu'il a été impossible de prouver que des mesures avaient été prises pour gêner ou éliminer l'activité syndicale. Une photocopie de la décision de la Direction de l'inspection du travail datée du 2 juin 1993 et des documents antérieurs sont joints.
- - A la Compañia Bananera Agropecuaria Río Jiménez SA: le représentant de l'ANTEP a demandé une audience au ministère du Travail afin d'analyser avec les représentants de l'entreprise certaines questions relatives au travail, mais cela n'a pu se faire, l'entreprise ayant répondu qu'en matière de relations professionnelles son interlocuteur était le comité permanent des travailleurs. Le gouvernement souligne qu'à aucun moment le syndicat qui a entrepris cette démarche n'a porté plainte pour persécution antisyndicale à propos des licenciements dont l'organisation fait état. Plus spécifiquement, le gouvernement réfute l'information alléguant les persécutions antisyndicales, étant donné que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale n'a reçu aucune plainte. A cet effet, il est joint un certificat du directeur national et de l'inspecteur général du travail.
- - A l'entreprise Industrias Realtex SA: les faits sont similaires à ceux signalés à propos des entreprises Corporación Peter SA et Compañia Bananera Agropecuaria Rio Jiménez SA. Le gouvernement réfute les allégations, étant donné que la plainte sur les prétendus licenciements massifs, y compris de militants syndicaux, n'a pas été enregistrée auprès du ministère du Travail et de la Sécurité sociale.
- En tout cas, il y a lieu de faire savoir avec quelle attention le service des relations du travail du ministère en question a traité les demandes d'intervention formulées par l'ANTEP concernant les risques de faillites et de licenciements dans l'entreprise. Les représentants de l'entreprise et du syndicat ont été convoqués, et un règlement a été conclu et signé à la satisfaction des deux parties.
- Il en résulte que les allégations supplémentaires susmentionnées ne sont aucunement fondées.
- 402. Par ailleurs, le gouvernement indique que les organisations syndicales se sont adressées aux instances internationales pour déposer des plaintes au sujet de situations qu'elles n'ont pas cherché à résoudre comme il se doit en épuisant tout d'abord les voies de recours internes; cela est d'autant plus vrai que bon nombre de ces questions auraient à l'évidence été évitées si ces recours avaient eu lieu. En effet, les tribunaux chaque fois qu'ils ont été appelés à régler des différends ont convenablement appliqué tant la législation nationale que les conventions de l'OIT.
- 403. Dans sa communication datée du 20 septembre 1994, le gouvernement déclare qu'il importe au plus haut point de faire ressortir que les informations sur la situation législative du Costa Rica concernant l'exercice du droit syndical sont dans leur ensemble un tissu d'allégations téméraires visant à jeter le discrédit sur la détermination du gouvernement à tout mettre en oeuvre pour étendre et améliorer la législation du travail en vigueur conformément aux normes internationales en vigueur. Le gouvernement se réfère au rapport de la mission de contacts directs au Costa Rica (octobre 1993) et au rapport de la commission d'experts, 1994, qui inclut le Costa Rica dans la liste des cas de progrès, notamment en ce qui concerne les conventions nos 87, 98 et 135. Les deux rapports exposent nettement et clairement les améliorations qui ont été apportées à la législation du travail et vont même plus loin que les observations formulées par les organes de contrôle du BIT, raison pour laquelle ces allégations ne sont plus pertinentes ou n'ont plus aucune base juridique.
- 404. Le gouvernement ajoute que, contrairement à ce que déclarent les plaignants, le gouvernement du Costa Rica, conformément à l'accord conclu avec les représentants des principales organisations syndicales en novembre 1993, a commencé à élaborer un projet de normes réglementaires pour améliorer la compréhension et l'application de la loi no 7360. Ce projet a été transmis pour consultation aux représentants des principaux syndicats afin qu'ils puissent proposer des amendements au texte et ainsi, sur la base d'un consensus, en rédiger la version finale.
- 405. Il importe au plus haut point de signaler que le gouvernement, le 16 août 1994, par une mesure unique dans l'histoire de la législation du travail du Costa Rica visant à moderniser le pays, a réinstallé le Conseil supérieur du travail et a soumis à cet organe tripartite, pour consultation, un total de 14 conventions et 12 recommandations internationales adoptées par la Conférence internationale du Travail. Le gouvernement souhaite désormais maintenir un dialogue permanent et ouvert avec cet organe sur les problèmes d'intérêts nationaux.
- 406. Le gouvernement affirme qu'au Costa Rica l'administration ou la gestion des fonds d'indemnisation du chômage n'incombe pas uniquement aux associations solidaristes. Dans la réalité, il existe un processus normatif qui, par le biais d'une convention collective, règle la participation des syndicats à l'administration des fonds d'indemnisation du chômage. De toute manière, le gouvernement réaffirme sa décision d'apporter son soutien et éventuellement les améliorations nécessaires au projet de loi sur le fonds de prévoyance des travailleurs et la démocratisation économique qui a été présenté à l'Assemblée législative par le gouvernement antérieur. Ce qui est intéressant dans ce projet, et comme l'a demandé la commission d'experts, c'est qu'il ne limite pas la gestion des fonds d'indemnisation du chômage aux associations solidaristes, mais prévoit expressément la participation des organisations syndicales et des coopératives.
- 407. Le gouvernement signale que les commentaires des organisations plaignantes au sujet de l'article 369 du Code du travail, qui interdit les grèves dans les services publics et ceux qui effectuent des travaux agricoles, ne sont plus valables parce qu'un projet de loi sur le régime juridique de l'emploi dans les services publics rédigé avec l'assistance technique du BIT a été élaboré et déposé sur le bureau de l'Assemblée législative. Ce projet de loi régit, entre autres, le droit de grève des fonctionnaires dans les services non essentiels des institutions publiques et définit les services publics dans lesquels la grève est interdite ou limitée, en particulier par l'instauration de services minima. Les dispositions qui restreignent gravement les grèves sont donc abrogées. Dans ces conditions, étant donné que le projet de loi a été rédigé avec l'assistance technique du BIT, il est clair que l'exercice du droit de grève est compatible, en termes généraux, avec les principes des organes de contrôle de l'OIT, les commentaires formulés par les organisations plaignantes à cet égard ne sont fondés ni en fait ni en droit.
- 408. En ce qui concerne la négociation collective dans l'administration publique, le projet de loi sur le régime juridique de l'emploi dans les services publics a été soumis à l'Assemblée législative en avril 1994 et publié au Journal officiel (La Gaceta) le 7 juillet 1994, conformément aux engagements nationaux et internationaux contractés par le gouvernement antérieur. Le projet de loi énonce notamment les principes et les normes générales régissant les relations individuelles et collectives entre l'administration publique centrale et décentralisée et ses agents, conformément aux principes juridiques pertinents. Ainsi, pour ce qui est de la négociation collective dans le secteur public, le titre V dudit projet de loi reconnaît clairement le droit syndical des fonctionnaires ainsi que les droits qui en découlent. De la même façon, il réglemente le régime de négociation collective dans le secteur public en déterminant le champ d'application, les garanties d'un fonctionnement efficace et de la continuité des services essentiels en plus des buts, des conditions, des procédures et des limitations de la négociation collective reconnues aux échelons national, professionnel et institutionnel.
- 409. Dans sa communication datée du 25 octobre 1994, le gouvernement fait savoir que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, par l'intermédiaire de ses organes administratifs compétents, a traité avec diligence et objectivité l'ensemble des procédures instituées par les travailleurs et leurs organisations représentatives relatives au conflit survenu à la Geest Caribbean Americas Ltda., entreprise Proyecto Islas. Cette procédure administrative a abouti à des accords importants qui ont mis fin au conflit.
- 410. Dans un document daté du 21 avril 1994, M. Luis Pablo Zuñiga Morales, représentant le SITAGAH et la FENTRAP, a informé le ministère du Travail et de la Sécurité sociale que "les travailleurs des plantations de bananes nos 1, 2, 3 et 4 appartenant à la Geest Caribbean Americas Ltda. se sont mis en grève pendant trois jours en raison du refus de l'entreprise de négocier les taux de rémunération de diverses tâches avec les comités permanents, conformément à l'arrangement direct". Il a aussi demandé dans ce même document que les représentants de l'entreprise soient convoqués à une réunion en vue de parvenir à un règlement du conflit. Le gouvernement fait remarquer que, loin de critiquer le comité permanent des travailleurs, le syndicat a fait appel à cet organisme, l'a défendu et l'a favorisé, contrairement à ce qui est déclaré dans la plainte présentée à l'OIT. Le même jour, le 21 avril, une réunion a été organisée entre les parties au conflit à la demande du ministre du Travail et de la Sécurité sociale qui a abouti à un règlement qui a mis fin à la grève. Le 27 avril 1994, les parties se sont rencontrées pour entamer les négociations prévues dans l'accord qui avait mis fin à la grève. Les négociations ont été retardées à plusieurs reprises entre cette date et le 3 mai 1994 en l'absence des représentants de l'employeur. Le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, face à cette situation, a fait preuve de diligence et de persévérance pour établir le dialogue et la compréhension comme le montrent les rapports.
- 411. Néanmoins, ajoute le gouvernement, bien qu'une autre réunion ait été convoquée le 9 mai 1994, une nouvelle grève surprise a éclaté dans l'ensemble des plantations appartenant à la Geest Caribbean, Proyecto Islas, Sarapiquí, dans la province de Herédia. Dès lors, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a une nouvelle fois pris des mesures pour parvenir à un accord. A ce titre, un certain nombre de réunions ont été organisées, dont certaines ont rencontré une résistance dans l'entreprise, mais une réunion a pu être organisée entre les parties au conflit le 16 mai 1994. Le jour même, grâce à la médiation du ministre du Travail et de la Sécurité sociale, les parties, à savoir des représentants du SITAGAH et de la Geest Caribbean Americas Ltda., se sont rencontrées dans le bureau du ministre et ont signé un accord pour mettre fin au conflit. Par la suite, plusieurs réunions se sont tenues au ministère du Travail et de la Sécurité sociale pour surveiller le respect des accords conclus dans ce document.
- 412. A ce jour, la troisième question du document reste à résoudre, on l'espère, dans les prochains jours, étant donné que les représentants de l'entreprise et de l'organisation syndicale vont participer à la dixième session de la Commission du travail dans les plantations tenue au BIT à Genève (Suisse).
- 413. Le gouvernement estime que les organisations plaignantes travestissent les faits en contredisant leur déclaration contenue dans le point 7 du document susmentionné daté du 16 mai 1994, qui affirme en particulier: "les deux parties tiennent à exprimer leur gratitude envers le ministre du Travail et de la Sécurité sociale, M. Farid Ayales Esna, pour sa médiation opportune et précieuse sur cette question. Grâce à sa diligence, les parties sont parvenues à un accord acceptable dans l'intérêt de la paix sociale dans la région de Sarapiquí." "Les deux parties" signifient la Geest Caribbean Americas Entreprise et le syndicat SITAGAH. Telle était la situation et, grâce au principe de la négociation de bonne foi et de la logique juridique, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, en agissant comme médiateur et en obtenant une solution au conflit, a montré son attachement à garantir le respect des termes conclus entre les parties, et le cas de la Geest Caribbean ne constitue pas une exception comme cela ressort des documents annexés. Ceux-ci montrent que le gouvernement a fait des efforts répétés pour garantir la mise en oeuvre des accords du document susmentionné daté du 16 mai 1994 respectant pleinement le principe "pacta sunt servanda".
- 414. Dans ce contexte, le gouvernement considère la plainte comme irréfléchie, intempestive et préjudiciable au principe de bonne foi, étant donné que le processus conduisant à la mise en oeuvre des points de l'accord est en cours et que les dirigeants syndicaux du SITAGAH ont signé un accord mettant fin au conflit, mais qu'ils ont quelques jours après présenté une plainte à l'OIT contre le gouvernement du Costa Rica en violation de la liberté syndicale et pour ingérence par les associations solidaristes dans les affaires syndicales et la négociation collective dans les plantations de bananes de Sarapiquí.
- 415. A cet égard, il convient de noter l'attitude contradictoire du syndicat qui essaie de jouer sur deux tableaux en même temps. Selon un mémorandum daté du 16 juin 1994, après que la plainte évoquée dans le présent rapport ait été présentée, le secrétaire général du SITAGAH a demandé au ministère du Travail et de la Sécurité sociale de réviser la procédure établie pour l'examen des licenciements, tel que prévu au point 3 du document daté du 16 mai. Dans le même mémorandum, il fournit aussi des informations sur la nomination par son organisation de représentants à la "commission tripartite" prévue dans le document pour examiner les licenciements. Compte tenu de tous ces éléments, le gouvernement ne réussit pas à comprendre pourquoi l'organisation plaignante s'adresse à une organisation internationale pour lancer des accusations contre lui alors qu'il a toujours été disposé à examiner les problèmes qu'elle soulève. En outre, le 20 août 1994, le secrétaire du SITAGAH a demandé une nouvelle fois au ministère du Travail et de la Sécurité sociale de "convoquer, conformément à la législation du travail et au règlement interne de l'institution, l'entreprise Geest Caribbean Americas Ltda. en vue de chercher une solution aux problèmes suivants: suite donnée au document du 16 mai 1994 et déduction des cotisations syndicales ainsi que l'ont demandé les membres et le syndicat".
- 416. Comme on a pu le voir dans ce qui précède, pour ce qui est de la médiation ministérielle, tous les efforts déployés ont abouti à un important accord mettant fin au différend. Ceci confirme le caractère irréfléchi de la plainte en question dans la mesure où elle n'est fondée ni en fait, ni en droit, raison pour laquelle elle devrait être rejetée carrément, sans perdre de vue qu'elle a été déposée après le règlement du différend. A plus forte raison, il conviendrait de noter que le gouvernement est allé au-delà de la conciliation et de la médiation en faisant procéder à des inspections par l'intermédiaire de la Direction nationale et de l'Inspection générale du travail du ministère du Travail et de la Sécurité sociale. Les mesures qu'il a prises pour donner suite à la plainte du syndicat pour persécution et pratiques de travail déloyales sont exposées ci-après.
- 417. La Direction nationale de l'Inspection générale du travail a, à tout moment, suivi la procédure pertinente pour examiner la plainte pour persécution présentée par le syndicat contre la Geest Caribbean Americas Ltda. Actuellement, comme en témoignent les informations annexées, l'enquête en question est au stade de la réception et de l'analyse des documents fournis par l'organisation plaignante.
- 418. Par ailleurs, étant donné que la plainte mentionne de prétendus incidents violents entre la garde civile du Costa Rica et certains travailleurs, il importe de signaler que la garde civile a agi à la requête de la mairie de Sarapiquí, province de Herédia, sur la base d'une décision du 11 mai 1994 ordonnant "le rétablissement de l'accès à la route et la levée des obstacles empêchant la libre circulation de la police administrative", étant donné que la route avait été bloquée par un groupe de manifestants. En tout état de cause, il convient de noter que les forces de sécurité sont soumises à l'ordre juridique constitutionnel et à l'autorité judiciaire compétente. En ce sens, les mesures prises par les forces de sécurité présentes sur le théâtre des opérations évoquées dans la plainte ont été conformes à la loi et aux structures institutionnelles en vigueur dans le pays.
- 419. Il convient de noter que les plaignants ont engagé des poursuites judiciaires. Néanmoins, leurs efforts ont été vains car mal planifiés, étant donné que le cas relevait de la compétence des tribunaux ordinaires et non de la Chambre constitutionnelle où ils ont déposé leur plainte.
- 420. Enfin, les allégations restantes de pratiques de travail déloyales, parmi lesquelles on trouve le licenciement de travailleurs syndiqués, l'ingérence d'associations solidaristes dans les affaires syndicales et l'utilisation par la Geest Caribbean Americas Ltda. (branche de Costa Rica) de polices privées pour empêcher le développement syndical et atteindre l'organisation syndicale plaignante, sont actuellement examinées par la Direction nationale de l'Inspection du travail qui rendra un rapport prochainement.
D. Conclusions du comité
D. Conclusions du comité- 421. Le comité observe que les allégations concernent: 1) les insuffisances de la loi au regard de la grève et de la négociation collective dans le secteur public ainsi que de la protection contre la discrimination antisyndicale; 2) plusieurs lois et projets de restructuration du secteur public; 3) divers actes de discrimination antisyndicale et diverses pratiques hostiles aux syndicats; et 4) les rôles respectifs des syndicats et des associations solidaristes.
- Allégations relatives à la législationet à certains projets de loi
- 422. En ce qui concerne les insuffisances de la loi au regard de la discrimination antisyndicale, de la négociation collective et de la grève, le comité prend note de l'observation formulée par la commission d'experts à sa session de février 1994 à la lumière du rapport de la mission de contacts directs qui a été effectuée du 4 au 8 octobre 1993 et qui a pris connaissance d'évolutions législatives récentes et importantes. Le comité tient à mettre en évidence les paragraphes ci-après de la commission d'experts (observations sur l'application de la convention no 87) en ce qui concerne certaines lois et projets de loi récents (cette commission a inscrit le Costa Rica sur la liste des cas de progrès - conventions nos 87, 98 et 135):
- La commission note avec satisfaction que le décret législatif no 7348 a abrogé les articles 333 et 334 du Code pénal, selon lesquels la grève des fonctionnaires et des agents de la fonction publique était passible de prison et d'amende. La commission note également avec satisfaction que la loi du 4 novembre 1993 donne suite de la façon suivante à diverses demandes formulées par la commission dans ses observations antérieures:
- - Pour ce qui est de la demande, exprimée par la commission et le Comité de la liberté syndicale, que les associations solidaristes n'assument pas de fonctions syndicales et n'engagent pas en particulier de négociation collective, la nouvelle loi interdit aux associations solidaristes "d'exercer toute activité visant à combattre ou à entraver de quelque façon la formation et le fonctionnement des organisations syndicales et des coopératives", "de conclure des conventions collectives ou des accords directs en matière de travail"; "de participer à des contrats et conventions collectifs". La nouvelle loi prévoit également que, "lorsqu'il existe dans une entreprise un syndicat auquel est affiliée au moins la moitié plus un de ses travailleurs, il sera interdit à l'employeur d'engager une négociation collective, à quelque titre que ce soit, si ce n'est avec le syndicat. Les accords qui seraient conclus dans un sens contraire aux dispositions du présent article ne seront ni enregistrés ni approuvés par le ministère du Travail et de la Sécurité sociale et ne pourront être opposés aux syndicats".
- - En ce qui concerne la demande exprimée par la commission et le Comité de la liberté syndicale afin que toute inégalité de traitement soit supprimée entre associations solidaristes et syndicats, la nouvelle loi dispose que le nombre minimum de travailleurs exigé pour la création d'un syndicat sera de 12 (nombre identique à celui qui est nécessaire à la constitution des associations solidaristes).
- - Au sujet de la demande formulée par la commission d'experts et le Comité de la liberté syndicale pour qu'une protection efficace soit assurée contre toute forme de discrimination antisyndicale, la nouvelle loi:
- a) interdit "les actions ou omissions tendant à éviter, limiter, contraindre ou empêcher le libre exercice des droits collectifs des travailleurs, de leurs syndicats ou des groupements de travailleurs", établissant aussi que "tout acte qui en résulterait sera nul et non avenu et sera sanctionné, de la manière et dans les conditions énoncées dans le Code du travail, ses lois supplétives ou connexes, pour infraction à des dispositions prohibitives";
- b) dispose que la stabilité du travail est garantie aux membres des syndicats en cours de formation (pour un délai maximal de quatre mois), à un certain nombre de dirigeants syndicaux (tant qu'ils sont en fonction et jusque six mois après) et aux candidats au comité directeur (pendant trois mois, à partir du moment où ils ont posé leur candidature). La loi établit que, en cas de licenciement sans juste motif des travailleurs protégés par cette stabilité, "le tribunal du travail compétent déclarera ce licenciement nul et non avenu et ordonnera par conséquent la réintégration du travailleur et le paiement des salaires non versés, ainsi que les sanctions qu'il conviendra d'imposer à l'employeur, conformément à ce code et à ses lois supplétives et connexes";
- c) établit que "sont des fautes punissables les actions ou omissions que commettraient les employeurs, les travailleurs ou leurs organisations respectives, qui enfreindraient les normes prévues dans les conventions adoptées par l'Organisation internationale du Travail, ratifiées par l'Assemblée législative, et les normes prévues dans le présent code et dans les lois de sécurité sociale". La nouvelle loi fixe une échelle de sanctions pouvant atteindre 23 mois de salaires minima.
- Le gouvernement indique également que le 8 octobre 1993 la Cour suprême de justice a déclaré légitime un recours en amparo, appliquant directement les conventions nos 87, 98 et 135 et ordonnant la réintégration des syndicalistes licenciés sans motif.
- ...
- Par ailleurs, la commission a pris connaissance avec intérêt des deux projets de loi qui ont fait suite aux demandes qu'elle avait formulées afin que les organisations syndicales - et non uniquement les associations solidaristes - puissent administrer des fonds d'indemnisation du chômage (projet de loi sur le fonds de prévoyance des travailleurs et la démocratisation économique), et que la définition des services publics dans lesquels la grève est interdite soit restreinte aux services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire ceux dont l'interruption pourrait mettre en danger, dans toute ou partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne (projet de loi sur le régime juridique de l'emploi dans les services publics et la fonction publique, qui prévoit notamment une dérogation aux alinéas a) et b) de l'article 369 du Code du travail, lequel limitait de manière excessive la grève dans le secteur public et dans celui de l'agriculture et de la foresterie). (Ce dernier projet contient également des dispositions réglementant la négociation collective dans le secteur public.)
- La commission apprécie les progrès substantiels qui ont été réalisés dans le sens de l'application des conventions nos 87, 98 et 135, et elle prie le gouvernement de la tenir informée de l'évolution des deux autres projets de lois susmentionnés (qui ont bénéficié de l'assistance technique du Bureau).
- 423. Par ailleurs, la commission d'experts, à sa session de février 1994, lors de l'examen de l'application de la convention no 98, a exprimé l'avis suivant en rapport avec le droit de négociation collective des fonctionnaires publics ne participant pas à l'administration de l'Etat.
- Dans sa précédente observation, la commission avait exprimé l'espoir que l'avant-projet de loi concernant la négociation collective dans le secteur public et décentralisé serait adopté dans un proche avenir.
- A cet égard, la commission constate que le gouvernement déclare dans son rapport que, du fait que le Code du travail n'est pas applicable au secteur public, le Conseil supérieur du travail (organisme tripartite) a élaboré un règlement tendant à combler ce vide juridique, que le gouvernement a adopté par voie de la directive no 162 du 9 octobre 1992, qui garantit aux travailleurs le droit de négociation collective. L'article 18 de cet instrument dispose qu'il s'agit de normes à caractère transitoire, en attendant que l'Assemblée législative soit saisie d'un projet de loi sur la solution des conflits dans le secteur public. La commission constate en outre, à la lecture du rapport du gouvernement, qu'une commission bipartite (gouvernement-syndicats) négocie depuis mai 1993 les termes de la loi susvisée et que les résultats obtenus se révèlent satisfaisants pour les deux parties. De plus, un accord conclu le 8 novembre 1993 entre le gouvernement et certaines organisations syndicales exprime l'engagement de mener à bien l'élaboration du texte en question au plus tard le dernier jour du mois de février de l'année suivante, afin que l'exécutif puisse en saisir l'Assemblée législative. Dans le cas où ce texte ne pourrait être présenté dans sa totalité, il est prévu d'en présenter au moins ce qui correspond à la négociation collective et à la grève dans le secteur public. Le gouvernement déclare avoir suivi avec une attention particulière les suggestions du BIT à propos de cette question.
- La commission exprime l'espoir que la législation concernant la négociation collective dans le secteur public sera adoptée dans un proche avenir et que cette législation sera conforme aux dispositions de la convention. Elle prie le gouvernement de la tenir informée à ce sujet.
- 424. Le comité se joint aux commentaires de la commission d'experts sur les progrès considérables intervenus dans la législation en ce qui concerne les conventions nos 87, 98 et 135. Il demande instamment que les projets de loi sur l'emploi public, la négociation collective et la grève dans le secteur public et sur le fonds de formation (qui ont déjà bénéficié de l'assistance technique du BIT et qui ont été soumis à l'Assemblée législative) soient adoptés dans un proche avenir et qu'ils soient en pleine conformité avec les conventions ratifiées concernant la liberté syndicale et la négociation collective. Le comité prie instamment le gouvernement d'accélérer la présentation des projets susmentionnés et de poursuivre ce processus avec l'assistance technique du BIT et en particulier de garantir pleinement le droit de grève aux travailleurs de l'agriculture, de l'élevage et de la foresterie et de faire en sorte que les conventions collectives dans le secteur public ne puissent être révisées par les autorités une fois conclues.
- 425. Par ailleurs, le comité observe que les organisations plaignantes ont fait objection à la loi générale sur la concession de travaux publics et à deux projets relatifs à la restructuration du secteur public ("démocratisation du secteur public" et "Conseil national portuaire"), et que, selon le gouvernement, il est impossible de faire des commentaires sur le sujet, les organisations plaignantes n'ayant pas fourni suffisamment de précisions. Le comité relève que ces textes ne concernent pas l'exercice des droits syndicaux, à l'exception de l'article 51 du projet relatif au Conseil national portuaire qui interdit aux travailleurs dudit conseil de se mettre en grève. Le comité considère que ces travailleurs devraient pouvoir exercer leur droit de grève, étant donné qu'ils ne sont pas des fonctionnaires de l'Etat agissant en tant qu'organe de la fonction publique et qu'ils n'assurent pas non plus un service essentiel au sens strict du terme. D'une manière générale, étant donné que les deux projets précités peuvent donner lieu à de vastes restructurations s'ils prenaient forme de lois, le comité prie les autorités d'entreprendre des consultations à cet égard avec les organisations syndicales, si cela n'a pas encore été fait.
- Allégations relatives à des actes de discrimination et à des pratiques antisyndicales
- 426. Pour ce qui est des allégations relatives à des licenciements et à des pratiques antisyndicales, le comité prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles l'inspection du travail a déclaré sans objet les licenciements et actes d'intimidation allégués visant à ce que les travailleurs quittent le syndicat dans l'entreprise Corporación Rojas Cortés SA. Le comité note également que, selon le gouvernement, la représentante syndicale Elizabeth Salas a été licenciée par l'entreprise Patisand SA parce qu'elle se trouvait en congé de maternité (et non à cause de son affiliation au syndicat); cette affaire a donc été soumise au tribunal du travail pour ledit motif. Au sujet des licenciements qui ont eu lieu dans l'entreprise Confecciones Imperio SA, le comité note que les travailleurs licenciés sont parvenus à un accord financier avec l'entreprise, mais il note également que le gouvernement n'a pas mentionné les causes de ces licenciements. Ne pouvant pas exclure le caractère antisyndical de ceux-ci et comme il existe un doute à cet égard, le comité souligne le principe selon lequel nul ne devrait faire l'objet de discrimination antisyndicale en raison de ses activités syndicales légitimes et que la possible réintégration dans leur poste de travail soit ouverte aux intéressés qui ont été l'objet de discrimination antisyndicale.
- 427. En ce qui concerne le licenciement antisyndical allégué de dix travailleurs de l'entreprise Talmana SA, le comité note, d'après le gouvernement, que l'inspection du travail a confirmé l'existence de persécutions antisyndicales et déclaré la plainte recevable. Le comité note que ces licenciements sont actuellement examinés par les autorités judiciaires et demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- 428. En ce qui concerne les licenciements qui auraient eu lieu dans les sociétés Corporación Peter SA, Compañía Bananera Agropecuaria Río Jiménez SA et Industrias Realtex SA, le comité note avec regret que le gouvernement s'est borné à déclarer que les plaintes sont inexactes et que les personnes intéressées n'ont pas déposé plainte. Le comité tient à souligner que les faits allégués se sont produits avant l'entrée en vigueur de la loi du 27 octobre 1993, dans un contexte où il n'existait pas de protection appropriée contre la discrimination antisyndicale, ce qui peut expliquer que les intéressés n'aient pas introduit de recours devant les instances nationales. Ces allégations ayant été assorties de précisions suffisantes, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour permettre aux dirigeants et aux membres d'organisations syndicales qui ont été licenciés en raison de leurs activités syndicales légitimes d'obtenir leur réintégration dans leur poste de travail. Le comité prie aussi le gouvernement de répondre aux allégations relatives aux licenciements et aux pratiques antisyndicales ayant eu lieu dans l'entreprise LACSA sur laquelle il n'a pas encore fait parvenir ses observations.
- 429. Pour ce qui est du refus allégué d'accorder un congé pour activités syndicales au dirigeant syndical Mario Rojas Vilchez, le comité note que, selon le gouvernement, ce refus s'explique par le fait que ce dirigeant n'était pas un fonctionnaire titulaire de l'établissement d'enseignement où il a exercé. Le comité considère que l'octroi de permissions pour activités syndicales qui sont prévues dans la législation ou dans les conventions collectives ne devrait pas dépendre de la titularisation ou non de l'employé en cause, surtout lorsqu'il s'agit d'un dirigeant qui, selon les organisations plaignantes, a déjà travaillé six ans dans l'établissement en question. Le comité demande donc au gouvernement de prendre des mesures pour que dorénavant M. Rojas Vilchez ne soit pas empêché de bénéficier d'autorisations d'absence pour activités syndicales auxquelles il a droit, et il observe que le gouvernement souhaite modifier la législation afin de garantir pleinement la jouissance des congés syndicaux.
- 430. En ce qui concerne les allégations relatives au conflit ayant éclaté entre les travailleurs des plantations de bananes et la Geest Caribbean Americas Ltda., le comité prend note des déclarations du gouvernement et du fait que la direction nationale de l'inspection du travail fera prochainement rapport sur la question. Tout en notant la gravité des allégations, le comité diffère leur examen dans l'attente de ce rapport et prie le gouvernement d'indiquer si une enquête judiciaire a été ouverte sur les actes de violence ayant eu lieu et au cours desquels plusieurs travailleurs ont été blessés.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 431. Vu les conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité prend note avec satisfaction des dispositions législatives récentes touchant la protection contre la discrimination antisyndicale et établissant des garanties pour que les associations solidaristes n'assument pas de fonctions syndicales et que les syndicats ne soient pas défavorisés par rapport aux associations solidaristes.
- b) Le comité demande instamment que le projet de loi sur le régime statutaire de l'emploi dans la fonction publique, sur la négociation collective et la grève dans le secteur public et le projet de loi sur le fonds de prévoyance des travailleurs et de démocratisation économique (qui autorise les syndicats, et pas uniquement les associations solidaristes à gérer les indemnités de chômage) soient adoptés dans un avenir proche et qu'ils soient en pleine conformité avec les conventions de l'OIT ratifiées. Le comité prie instamment le gouvernement d'accélérer le cours des deux projets et de suivre ce processus avec l'assistance technique du BIT.
- c) En ce qui concerne le projet de loi sur la "démocratisation du secteur public" et celui sur le "Conseil national portuaire", le comité demande aux autorités d'entreprendre des consultations à cet égard avec les organisations syndicales si cela n'a pas encore été fait, ainsi que de prendre des mesures pour faire en sorte que la future loi autorise les travailleurs du Conseil national portuaire à exercer leur droit de grève comme conséquence de leur liberté d'action.
- d) Le comité prie le gouvernement de le tenir informé du résultat du processus en cours auprès de l'autorité judiciaire relative au licenciement antisyndical allégué de dix travailleurs de l'entreprise Talmana SA.
- e) Le comité recommande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour permettre aux dirigeants et aux membres d'organisations syndicales qui ont été licenciés en raison de leurs activités syndicales légitimes d'obtenir leur réintégration dans leur poste de travail aux entreprises Corporación Peter SA, Compañía Agropecuaria Río Jimenez SA et Industrias Realtex SA.
- f) Le comité prie instamment le gouvernement de répondre aux allégations relatives au licenciement et aux pratiques antisyndicales ayant eu lieu dans l'entreprise LACSA sur lesquelles il n'a pas fait parvenir ses observations.
- g) Le comité prend note de l'intention du gouvernement de modifier la loi en matière de licence syndicale et demande instamment au gouvernement de prendre des mesures pour que dorénavant le dirigeant syndical Rojas Vilchez ne soit pas empêché de bénéficier des autorisations d'absence pour activités syndicales auxquelles il a droit.
- h) En ce qui concerne les allégations relatives au conflit ayant éclaté entre les travailleurs des plantations de bananes et la Geest Caribbean Americas Ltda., le comité prend note des déclarations du gouvernement et du fait que la direction nationale de l'inspection du travail fera rapport sur la question. Le comité note la gravité des allégations et diffère leur examen dans l'attente de ce rapport et prie le gouvernement d'indiquer s'il a ouvert une enquête judiciaire sur les actes de violence qui ont eu lieu et durant lesquels plusieurs travailleurs ont été blessés.