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Definitive Report - REPORT_NO272, June 1990

CASE_NUMBER 1506 (El Salvador) - COMPLAINT_DATE: 12-JUL-89 - Closed

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  1. 121. Cette plainte figure dans une communication du Syndicat général des travailleurs de l'industrie de la pêche et activités connexes (SGTIPAC) du 12 juillet 1989. Cette organisation a envoyé des informations complémentaires dans des communications des 8 août et 10 octobre 1989. Le gouvernement y a répondu dans une lettre du 22 mars 1990.
  2. 122. El Salvador n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations du syndicat plaignant

A. Allégations du syndicat plaignant
  1. 123. Le Syndicat général des travailleurs de l'industrie de la pêche et activités connexes (SGTIPAC) allègue que les entreprises de pêche Atarraya, SA, Camaronera Industrial Salvadoreña (CAMINSA), Société anonyme à capital variable (SACV), Pesquera Industrial Salvadoreña, SACV (PESQUINSA), Camaronera Salvadoreña, SA, Pesquera Ruiz Quiros, SA, Pesquera del Pacífico, SA, Bayena, SACV, Astilleros del Salvador, SACV, Marina del Pacífico, SACV, Promarisal, SACV, Productos Pesqueros del Mar, SA, Pesquera del Mar, SA, Productos Cocinados del Mar, SA, Mariscos San Simeón y Frutos del Océano, SA, tiennent à jour une liste des travailleurs affiliés au syndicat et qu'elles refusent d'embaucher les personnes sélectionnées par les capitaines ou patrons d'embarcations pour faire partie de leur équipage, si elles figurent sur cette liste.
  2. 124. L'organisation plaignante ajoute que l'entreprise Camaronera Industrial Salvadoreña (CAMINSA) a mis injustement un terme aux contrats des travailleurs Eudulfo Mauricio Tadeo Estupinian, Rigoberto Concepción Hernández, Ismael Antonio Hernández Cueva, David Antonio Henríquez, Félix Herrera Rivera, Jorge Alberto Escalante Cisneros, Alejandro Reyes Artola et Eduardo Martínez, parce qu'ils étaient membres du comité directeur de la section départementale de Sonsonate du syndicat; l'entreprise a ainsi violé la législation du travail, qui prévoit que les dirigeants syndicaux ne peuvent faire l'objet d'une suspension, d'un transfert ou d'un licenciement sans motif dûment justifié. L'entreprise Marina del Pacífico a mis un terme au contrat individuel de M. Carlos Alonso Alvarenga parce qu'il était membre du comité directeur de la sous-section de Acajutla du syndicat.
  3. 125. Ainsi qu'il ressort de la documentation reçue, l'organisation plaignante a lancé un ordre de grève le 26 juillet 1987 dans les entreprises Distribuidora Marina, SA, Náutica del Litoral, SA, Mariscos Crustáceos, SA, Pesquera Vidaurre, SA et Pesquera del Triunfo, en présentant une série de revendications professionnelles et économiques; en août 1987, l'autorité judiciaire a déclaré que cette grève était légale et, en octobre 1988, que les salaires de base devaient être payés pendant toute la durée de la grève. Les entreprises intéressées n'ayant pas versé les salaires, les travailleurs ont entamé une procédure de saisie de leurs biens, saisie rendue effective en janvier et février 1989. Puis les travailleurs ont constitué une entreprise ("Pesquera de Trabajadores Organizados") et demandé au Centre national de développement de la pêche et au Commandement de la marine nationale que leur soient délivrés des permis et licences de pêche provisoires afin de récupérer leurs arriérés de salaire et d'éviter que les embarcations ne deviennent inutilisables. Cependant, la Banque agricole commerciale (banque accréditrice des entreprises ayant fait l'objet d'une saisie) s'oppose à la délivrance de permis et de licences par les services compétents; il s'agit d'une tactique dilatoire entreprise de concert avec les employeurs susmentionnés. Dans sa dernière communication, le syndicat plaignant signale que les parties ne sont toujours pas parvenues à un accord (pour résumer, la Banque agricole commerciale propose de payer 50 pour cent des salaires ou des indemnités, sous réserve que les travailleurs libèrent les installations et lui remettent les biens des entreprises; le syndicat, quant à lui, propose soit le paiement de 85 pour cent des salaires, avec une marge de négociation, si le contrat collectif est maintenu, soit le paiement de 100 pour cent des salaires si les contrats individuels n'étaient pas renouvelés).
  4. 126. Par ailleurs, le syndicat plaignant allègue que les travailleurs des entreprises Productos Cocinados del Mar, SA, Pesquera del Mar, SA, Frutos del Océano, SA, Mariscos San Simeón, SA et Productos Pesqueros del Mar, SA ont déclenché une grève, le 9 décembre 1987, sur la base d'une série de revendications; le 19 décembre 1989, le tribunal civil d'Usulután a déclaré cette grève illégale dans les termes suivants: "A la seule lecture du certificat de grève, le soussigné (juge civil) constate que ce document n'est pas conforme aux dispositions de la loi et déclare par conséquent que la grève qui a éclaté dans lesdites entreprises est illégale." Selon le syndicat plaignant, les grévistes cherchaient à obtenir le paiement des salaires qu'ils avaient cessé de percevoir après que les représentants patronaux eurent illégalement suspendu les travaux, ainsi que le paiement de divers indemnités et arriérés que leur devaient les entreprises en question. Le syndicat plaignant ajoute que, le 29 juin 1989, 500 militaires de la Sixième brigade d'infanterie d'Usulután ont investi par la violence, avec l'aide de soldats de la Marine nationale, les installations du quai appartenant à Pezca, SACV, situé dans la baie de Jiquilisco, juridiction de Puerto El Triunfo, dans le département d'Usulután, et qu'ils ont fait évacuer de la même façon les grévistes qui occupaient les embarcations de pêche pour défendre leurs droits syndicaux légitimes.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 127. Le gouvernement déclare qu'il existe un conflit collectif du travail entre le Syndicat général des travailleurs de l'industrie de la pêche et activités connexes et les entreprises Atarraya, SA, Promarisal, SACV et Marina del Pacífico, SACV, parce que des travailleurs affiliés à ce syndicat ont été privés du droit au travail (avec les autres entreprises citées comme ayant pris des mesures antisyndicales, le syndicat demandeur n'a pas amorcé de conflit collectif du travail). La première mesure a consisté à citer les représentants légaux des entreprises défenderesses qui ont démenti les accusations lancées contre elles; elles ont réaffirmé leur droit de contrôler les personnes qui pénètrent sur leurs installations et, à cette fin, d'envoyer chaque semaine à leurs gardiens une liste des travailleurs qu'elles ont recrutés.
  2. 128. Pour ce qui est du licenciement allégué des dirigeants de la section départementale de Sonsonate du SGTIPAC - qui travaillent dans l'entreprise Camaronera Industrial Salvadoreña -, le gouvernement déclare que la Direction générale du travail a cité le représentant légal de l'entreprise à comparaître pour une tentative de conciliation; celui-ci, par l'entremise de son fondé de pouvoir judiciaire, a indiqué que la nature même de l'industrie de la pêche voulait que l'équipage soit recruté, en toute indépendance, par les capitaines ou patrons d'embarcations qui, dans le présent cas, n'ont pas accepté les personnes en question. L'entreprise ne peut rien faire pour les obliger à les recruter. Quant à M. Rigoberto Concepción Hernández, il s'est volontairement retiré, et les prestations qui lui étaient dues lui ont été dûment versées.
  3. 129. Par ailleurs, le gouvernement confirme que la première grève mentionnée par le syndicat plaignant a été déclarée légale et qu'elle a éclaté le 26 juillet 1987; la deuxième, dont l'ordre a été lancé le 9 décembre de la même année, a été déclarée illégale (l'entreprise Productos Pesqueros del Mar, SA, n'est associée à aucun des deux conflits susmentionnés). Le gouvernement indique que le ministère du Travail et de la Prévision sociale n'a aucune compétence pour se prononcer sur la légalité d'une grève et que cette décision relève de l'autorité judiciaire qui n'admet aucun recours. Par ailleurs, il faut souligner que la Direction générale du travail a respecté la procédure légale de règlement des conflits collectifs du travail et que le ministre du Travail et de la Prévision sociale a participé aux audiences (tout comme la Commission du travail et de la prévision sociale de l'Assemblée législative et le secrétaire privé du Président de la République) dans l'espoir de trouver une solution équitable au différend. Dans ce contexte, les parties intéressées et les représentants de la Banque agricole commerciale d'El Salvador, banque accréditrice des entreprises concernées, se sont rencontrés plusieurs fois; le ministre du Travail et de la Prévision sociale était présent à la dernière réunion, convoquée le 3 juillet 1988. Dès l'arrivée, en juin 1989, de la nouvelle administration, les parties ont manifesté leur volonté de régler par la voie légale le conflit qui les oppose. C'est pourquoi la banque a proposé une solution de rechange et la partie adverse a été écoutée; tant l'une que l'autre partie ont manifesté le désir et la volonté de reprendre le travail, au nom de l'harmonie qui devrait toujours prévaloir entre ouvriers et patrons.
  4. 130. Le gouvernement souligne enfin que, dans le Port "Triunfo", (département d'Usulután), les grèves déclenchées pour des motifs analogues ont été déclarées légales dans cinq entreprises mais illégales dans quatre autres. Le 29 juin 1989, les embarcations "Mufi", "Humeito", "Mayguay", "Dany" et "Lulu" ont été récupérées; elles ne faisaient pas l'objet d'une saisie judiciaire, ainsi qu'il ressort des actes du juge d'application et de ceux du juge de première instance de ce district judiciaire. Il y a lieu de souligner aussi que ces embarcations ne relèvent pas des entreprises dont la responsabilité est engagée du fait de la la grève légale. Par conséquent, le gouvernement n'a, à aucun moment, porté atteinte au droit de grève des travailleurs, mais il a en revanche assuré le respect des droits des employeurs et des tiers.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 131. Le comité regrette, en ce qui concerne le licenciement allégué de huit dirigeants syndicaux du secteur de la pêche, que le gouvernement se soit borné à déclarer en termes généraux que les équipages sont choisis en toute indépendance par les capitaines ou patrons d'embarcations. Le comité regrette aussi que le gouvernement n'ait fourni d'observations que sur trois des quinze entreprises qui, selon l'organisation plaignante, tiennent une liste des affiliés au syndicat et refusent d'embaucher les travailleurs qui y figurent (il s'agit des trois entreprises contre lesquelles des plaintes avaient été déposées au ministère du Travail et de la Prévision sociale). Le gouvernement s'est borné à signaler que ces entreprises avaient réfuté les accusations portées contre elles.
  2. 132. A cet égard, estimant que la réponse du gouvernement n'est pas satisfaisante, le comité signale à son attention le principe fondamental selon lequel personne ne doit être licencié ou faire l'objet d'autres mesures préjudiciables en matière d'emploi en raison de son affiliation syndicale ou de l'exercice d'activités syndicales légitimes, ainsi que l'importance qu'il attache à ce que tous les actes de discrimination en matière d'emploi soient interdits et sanctionnés dans la pratique. (Voir 270e rapport, cas no 1460 (Uruguay), paragr. 63.) En conséquence, le comité demande au gouvernement d'examiner de très près tous les cas de discrimination allégués par le syndicat plaignant, de redresser tous ceux qui seraient avérés et de sanctionner les responsables.
  3. 133. En ce qui concerne les grèves qui ont éclaté dans diverses entreprises de pêche depuis le deuxième semestre 1987, le comité observe que la première (déclenchée le 26 juillet 1987) a été déclarée légale par l'autorité judiciaire, qui a décrété le paiement des salaires de base pendant toute la durée de la grève; le comité note que, selon le gouvernement, les autorités ont pris des initiatives en vue du règlement de ce conflit et qu'actuellement les parties souhaitent trouver une solution.
  4. 134. Pour ce qui est de la deuxième grève, déclenchée le 9 décembre 1987, le comité observe que l'autorité judiciaire l'a déclarée illégale; il constate malheureusement que le texte de la décision judiciaire (transmise par le syndicat plaignant) n'est pas à proprement parler motivé et qu'elle se borne à indiquer que "à la seule lecture du certificat de grève, le soussigné (juge civil) constate que ce document n'est pas conforme aux dispositions de la loi et déclare par conséquent que cette grève est illégale". Toutefois, le comité regrette que le syndicat plaignant n'ait mentionné la déclaration judiciaire d'illégalité de la grève qu'en juin 1989 (date de sa plainte) alors que cette déclaration remonte à décembre 1987; depuis, le conflit s'est compliqué et détérioré, et, à cet égard, le comité ne peut s'empêcher de souligner qu'il existe une certaine confusion tant dans les allégations du syndicat plaignant que dans la réponse du gouvernement.
  5. 135. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures afin que les autorités du travail compétentes s'efforcent de rapprocher les parties, et il exprime l'espoir que les conflits collectifs déclenchés en 1987 trouveront rapidement une solution satisfaisante pour toutes les parties intéressées. Le comité demande au gouvernement d'étudier la possibilité de modifier la législation en matière de grève afin de déterminer clairement les droits des organisations syndicales.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 136. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité signale à l'attention du gouvernement le principe fondamental selon lequel nul ne doit être licencié ou faire l'objet de mesures préjudiciables en matière d'emploi à cause de son affiliation syndicale ou de l'exercice d'activités syndicales légitimes, ainsi que l'importance qu'il attache à ce que tous les actes de discrimination en matière d'emploi soient interdits et sanctionnés dans la pratique.
    • b) Le comité demande au gouvernement d'enquêter de très près sur tous les actes de discrimination allégués par le syndicat plaignant (licenciement de huit dirigeants syndicaux et recours à des "listes noires" par 13 entreprises), de redresser tous ceux qui seraient avérés et de sanctionner les responsables.
    • c) En ce qui concerne les grèves déclenchées dans diverses entreprises de pêche depuis le deuxième semestre de 1987, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures afin que les autorités du travail compétentes s'efforcent de rapprocher les parties, et il exprime l'espoir que ces conflits collectifs qui ont débuté en 1987 trouveront rapidement une solution satisfaisante pour toutes les parties intéressées. De plus, le comité demande au gouvernement d'étudier la possibilité de modifier la législation en matière de grève afin de déterminer clairement les droits des organisations syndicales.
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