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- 305. La plainte originale de la Fédération des travailleurs des industries chimiques et pharmaceutiques de l'Etat de São Paulo est contenue dans un télégramme en date du 11 mai 1968, complété par une lettre datée du 17 du même mois. Le texte du télégramme a été transmis au gouvernement le 20 mai 1968 et celui de la lettre le 6 juin 1968. Le gouvernement a présenté ses observations sur l'affaire par une communication en date du 28 août 1968.
- 306. D'autre part, le plaignant d'origine, conjointement avec d'autres organisations syndicales brésiliennes, a, par une communication en date du 19 juillet 1968, formulé de nouvelles allégations. Enfin, par une communication en date du 22 juillet 1968, le Syndicat des travailleurs de l'industrie du pétrole de Bahia a également formulé certaines allégations. Le texte de ces deux communications a été transmis le 29 juillet 1968 au gouvernement, lequel n'a pas encore présenté ses observations à leur sujet.
- 307. Le Brésil n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; il a ratifié, en revanche, la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- Allégations relatives à l'arrestation de dirigeants du Syndicat des travailleurs des industries chimiques et pharmaceutiques de Santo André
- 308 Dans son télégramme en date du 11 mai 1968, la fédération plaignante « proteste énergiquement » contre l'emprisonnement arbitraire de dirigeants syndicaux dans l'exercice de leurs fonctions et « exige des mesures immédiates » de la part de l'O.I.T.
- 309 Dans sa lettre, l'organisation plaignante apporte les précisions suivantes. Elle déclare en premier lieu que les dirigeants qui ont été victimes des mesures policières incriminées « représentent la direction effective du Syndicat des travailleurs des industries chimiques et pharmaceutiques de Santo André », une des principales filiales de la fédération auteur de la plainte.
- 310 Placé plusieurs années durant sous contrôle du ministère du Travail, poursuivent les plaignants, le syndicat serait redevenu libre à la fin de 1967, époque à laquelle il aurait été procédé à l'élection de la direction actuelle du syndicat. Les plaignants déclarent que ladite direction, dès le début de sa gestion, se serait trouvée confrontée avec de graves problèmes économiques et financiers résultant de la « situation chaotique » dans laquelle l'administration précédente aurait laissé le syndicat. « Ajoutons à cela - poursuivent les plaignants - la désaffection compréhensible de nombreux travailleurs qui se sentaient abandonnés et l'hostilité des employeurs qui, ayant pour unique objectif une exploitation éhontée de la main-d'oeuvre, ne pouvaient être favorables à un organisme indépendant, résolu à défendre à tout prix les travailleurs. »
- 311 Entre autres choses, déclarent les plaignants, la direction du syndicat aurait entrepris une intense campagne de syndicalisation de la base en s'efforçant de démontrer aux travailleurs les avantages de posséder un syndicat puissant et indépendant. A cet effet, elle aurait organisé des assemblées générales des entreprises en vue d'obtenir des travailleurs de chacune d'elles l'élection de délégués syndicaux par un vote direct et libre. Les convocations à ces assemblées, poursuivent les plaignants, sont faites directement à la porte des usines au moyen de bulletins dans lesquels, outre le but spécifique de l'élection, sont traitées d'autres questions comme le problème des salaires, la stabilité et la garantie de l'emploi, la prévoyance sociale, le droit de grève, etc.
- 312 Les plaignants allèguent que, le 10 mai 1968, alors qu'ils distribuaient des convocations aux portes des usines, convocations requérant la présence des travailleurs à une assemblée générale prévue pour le 12 du même mois, deux dirigeants du syndicat, MM. Josué de Souza Pacheco et Gildo Bonani, respectivement trésorier et secrétaire du syndicat, auraient été abordés par des inspecteurs de police qui, sans aucune explication, se seraient saisis de leur personne et les auraient conduits en voiture blindée dans les locaux de la police où ils auraient été enfermés « en compagnie de délinquants dangereux ». Ultérieurement, poursuivent les plaignants, les intéressés auraient été transférés à la Délégation de l'ordre politique et social du Secrétariat de la sécurité publique de l'Etat de São Paulo, qui est chargée d'enquêter sur les crimes contre la stabilité du régime. D'après les plaignants, il aurait été impossible de communiquer avec eux le lendemain, « quand ils furent libérés vers 7 heures après avoir été interrogés ».
- 313 « Lorsque fut constatée la disparition des dirigeants - déclarent les plaignants - les recherches commencèrent et on apprit qu'ils étaient détenus. Toutefois, les autorités de police, celles de São Caetano tout comme la Délégation de la police politique, refusèrent de divulguer le lieu de détention des prisonniers afin d'empêcher toute communication avec eux jusqu'au moment où ils furent relâchés. »
- 314 Les plaignants déclarent que les dirigeants arrêtés n'auraient reçu aucune explication concernant les raisons pour lesquelles ils seraient restés en prison pendant près de vingt-quatre heures, qu'aucune enquête n'aurait été faite et qu'il s'agit de « méthodes arbitraires couramment employées par le pouvoir contre les syndicats dans la personne de leurs dirigeants ».
- 315 « Notre fédération - poursuivent les plaignants - a élevé toutes les protestations qui s'imposaient devant les autorités compétentes, mais elle a tenu aussi à communiquer les faits à l'O.I.T afin que cet organisme international prenne connaissance de notre situation nationale en ce qui concerne les libertés syndicales et les garanties accordées aux dirigeants syndicaux et aux travailleurs en général.»
- 316 En conclusion, les plaignants s'expriment en ces termes: « Nous vous prions de bien vouloir prendre note de cet incident afin que, si des faits aussi regrettables se répètent, on connaisse les responsables. »
- 317 Dans ses observations, le gouvernement déclare qu'il est du devoir de l'Etat de veiller à sa sécurité et de maintenir l'ordre social et politique. Il lui incombe également, par l'intermédiaire de la police, d'exercer un contrôle sur tous les centres d'agitation susceptibles de se manifester. C'est dans ce contexte que les personnes intéressées ont été amenées dans les locaux de la police afin d'y subir un interrogatoire de routine et en aucun cas en raison de leurs activités syndicales. Le gouvernement indique d'ailleurs - ce qui est confirmé par les plaignants - que les dirigeants en cause ont été relâchés moins de vingt-quatre heures après avoir été appréhendés.
- 318 Le gouvernement signale enfin que les termes mêmes de la lettre des plaignants donnent à penser que ceux-ci ont rapporté les faits évoqués par eux à l'O.I.T pour l'information de cette dernière et non en vue d'une action de sa part.
- 319 Des éléments dont dispose le comité et, en particulier, des déclarations du plaignant, qui, sur ce point, ne sont pas infirmées par le gouvernement, il ressort que les deux dirigeants qui ont été arrêtés l'ont été alors qu'ils déployaient une activité syndicale normale, à savoir la distribution de tracts à l'entrée des usines convoquant les travailleurs à une assemblée syndicale. Il est vrai que le gouvernement fait valoir que cette mesure a été prise dans le souci de prévenir toute agitation; le comité note cependant que le gouvernement ne donne à cet égard aucune précision qui pourrait justifier les arrestations en question.
- 320 Sans entendre nier que le maintien de l'ordre ait pu être le motif qui, en la circonstance, a dicté leur action aux autorités publiques, le comité croit devoir insister de nouveau sur le fait que des mesures d'arrestation préventive exercées à l'encontre de dirigeants syndicaux sont, même si tel n'était pas leur but, susceptibles de constituer une grave immixtion dans l'exercice des droits syndicaux. Le comité tient à rappeler également que l'arrestation par les autorités de syndicalistes contre lesquels finalement - ainsi qu'il paraît être le cas dans la présente affaire - aucun chef d'inculpation n'est relevé pourrait entraîner des restrictions à la liberté syndicale, et à insister sur l'importance qu'il y a, dans de tels cas, à ce que les gouvernements prennent les dispositions nécessaires afin que les autorités intéressées reçoivent des instructions appropriées pour prévenir le risque que comportent pour les activités syndicales les mesures d'arrestation.
- 321 Ayant noté par ailleurs que, selon les allégations des plaignants, il n'aurait été donné aux intéressés aucune explication de la mesure qui les frappait, le comité croit devoir insister sur l'importance qu'il convient d'attacher au principe selon lequel « tout individu arrêté sera informé, au moment de son arrestation, des raisons de son arrestation et recevra notification, dans le plus court délai, de toute accusation portée contre lui ».
- 322 Sous réserve des observations qui précèdent, étant donné que les personnes en cause, après avoir été interrogées, ont été promptement relâchées sans qu'aucun grief n'ait apparemment été retenu contre elles, le comité estime qu'il serait sans objet de poursuivre cet aspect de l'affaire, ce qui, d'ailleurs, comme le relève le gouvernement et ainsi qu'il semble ressortir des passages de la seconde communication du plaignant cités aux paragraphes 315 et 316 ci-dessus, paraît n'être pas en contradiction avec l'intention de ce dernier lorsqu'il a adressé sa communication à l'O.I.T.
- 323 Dans ces conditions, pour les raisons indiquées au paragraphe précédent et sous réserve des observations contenues aux paragraphes 320 et 321 ci-dessus, le comité recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect du cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.
- Allégations relatives à l'occupation militaire des locaux du Syndicat de la métallurgie d'Osasco
- 324 Dans une communication en date du 19 juillet 1968 adressée à l'O.I.T par la Fédération des travailleurs des industries chimiques et pharmaceutiques de São Paulo, conjointement avec d'autres organisations syndicales brésiliennes, il est allégué que les locaux du Syndicat de la métallurgie d'Osasco auraient été occupés militairement. Considérant le principe démocratique de la liberté d'association comme une garantie indispensable à la protection du travail et à l'amélioration des conditions de vie, les plaignants en appellent à l'O.I.T pour que cette dernière intervienne auprès du gouvernement brésilien afin que cessent ces « actes arbitraires ».
- 325 Ces allégations ont été portées par une lettre en date du 29 juillet 1968 à la connaissance du gouvernement, qui n'a pas encore présenté ses observations à leur sujet.
- 326 Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration de prier le gouvernement de bien vouloir présenter ses observations sur cet aspect du cas et, en attendant, d'en ajourner l'examen.
- Allégations relatives à l'occupation militaire des locaux du Syndicat des travailleurs de l'industrie du pétrole de Bahia et à l'arrestation des dirigeants de ce syndicat
- 327 Par une communication en date du 22 juillet 1968, le Syndicat des travailleurs de l'industrie du pétrole de Bahia allègue que ses dirigeants auraient été emprisonnés et que les locaux du syndicat auraient été envahis par les forces militaires « pour soutenir la compagnie d'Etat Petrobras ».
- 328 Ces allégations ont été portées par une lettre en date du 29 juillet 1968 à la connaissance du gouvernement, qui n'a pas encore fait parvenir ses observations à leur sujet.
- 329 Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration de prier le gouvernement de bien vouloir présenter ses observations sur lesdites allégations et, en attendant, d'ajourner son examen de cet aspect de l'affaire.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 330. En ce qui concerne le cas dans son ensemble, le comité recommande au Conseil d'administration:
- a) de décider, pour les raisons indiquées au paragraphe 322 ci-dessus et sous réserve des observations contenues aux paragraphes 320 et 321, que les allégations relatives à l'arrestation de dirigeants du Syndicat des travailleurs des industries chimiques et pharmaceutiques de Santo André n'appellent pas de sa part un examen plus approfondi;
- b) de prier le gouvernement de bien vouloir présenter ses observations en ce qui concerne, d'une part, les allégations relatives à l'occupation militaire des locaux du Syndicat dé la métallurgie d'Osasco, d'autre part, les allégations relatives à l'occupation militaire des locaux du Syndicat des travailleurs de l'industrie du pétrole de Bahia et à l'arrestation des dirigeants de ce syndicat, respectivement évoquées aux paragraphes 324 et 327 ci-dessus;
- c) de prendre note du présent rapport intérimaire, étant entendu que le comité fera de nouveau rapport lorsqu'il sera en possession des informations dont la nature est précisée à l'alinéa précédent.