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La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) reçues le 16 septembre 2020, des observations conjointes de la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT) et de la Confédération des travailleurs de Colombie (CTC) reçues le 1er octobre 2020, ainsi que des commentaires du gouvernement y relatifs. La commission note que ces différentes observations portent sur des questions abordées par la commission dans la présente observation, ainsi que sur des allégations de violations de la convention dans la pratique.
La commission prend également note des observations de l’Association nationale des employeurs de Colombie (ANDI) transmises par l’Organisation internationale des employeurs le 1er octobre 2020, qui portent sur les questions abordées dans la présente observation.
Droits syndicaux et libertés publiques. La commission rappelle qu’elle examine depuis de nombreuses années, comme le Comité de la liberté syndicale, des allégations de violence à l’encontre de syndicalistes et d’impunité à ce sujet. La commission note avec une profonde préoccupation que la CSI, la CUT et la CTC continuent à dénoncer la persistance de la situation de violence antisyndicale dans le pays. À cet égard, la commission note que la CSI, après avoir fait état de l’impact particulièrement élevé de la violence antisyndicale dans les secteurs de l’éducation, des transports, des mines et de l’énergie, dénonce spécifiquement les faits suivants: i) l’assassinat, entre janvier 2019 et mars 2020, de 14 dirigeants syndicaux; ii) pendant la même période, quatre tentatives de meurtre, un cas de disparition forcée et 198 cas de menaces de mort à l’encontre de membres du mouvement syndical; iii) l’assassinat le 26 juillet 2020 d’un dirigeant syndical agraire; iv) la surveillance et la filature, entre février et décembre 2019, par des agents de l’armée, de plusieurs dirigeants syndicaux et sociaux, dont le vice-président de l’Union nationale des travailleurs de l’État et des services publics de la Colombie (UTRADEC) et le secrétaire aux droits de l’homme de la Confédération générale du travail (CGT), M. Humberto Correa; et v) l’incapacité du gouvernement d’assurer une protection prompte et adéquate aux syndicalistes menacés de mort, ou de mener des poursuites dans les nombreux cas historiques d’assassinats et d’autres crimes violents, et de résoudre la plupart des cas les plus récents.
La commission note également que la CUT et la CTC font état de la persistance d’une situation intense de violence antisyndicale, dont les caractéristiques sectorielles et territoriales sont analogues à celles décrites en 2019, avec une recrudescence particulièrement notable de la violence antisyndicale dans le secteur rural, notamment dans les zones autrefois contrôlées par les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). Les centrales syndicales déclarent que les forces paramilitaires et de nouveaux groupes de délinquance, qui se sont constitués dans certaines régions en lien avec des pouvoirs économiques et politiques territoriaux, sont la principale source de menace pour le syndicalisme. Elles ajoutent que les syndicats les plus touchés par la violence antisyndicale sont ceux de l’agriculture, de l’éducation, du secteur minier et énergétique, du secteur public et des transports.
La commission note que la CUT et la CTC affirment expressément ce qui suit: i) trois ans après la signature de l’accord de paix, 998 atteintes à la vie et à l’intégrité de dirigeants syndicaux ont été enregistrées entre 2016 et mai 2020 (dont 119 homicides); ii) entre août 2019 et mai 2020, 141 nouveaux actes de violence antisyndicale documentés ont été signalés, dont 18 homicides et 101 menaces de mort, le nombre d’homicides tendant à augmenter depuis 4 ans; iii) 44 pour cent des actes de violence antisyndicale sont imputables à des groupes paramilitaires, et 52 pour cent sont d’origine inconnue; (iv) Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a enregistré 55 massacres dans le pays depuis janvier 2020 contre 36 en 2019, des actes qui, bien qu’ils ne visent pas directement les syndicats, compromettent la capacité des organisations de travailleurs de réaliser librement leurs activités, par crainte de représailles à leur encontre; v) la grève nationale de novembre 2019 contre la politique économique et sociale du gouvernement, et pour le respect de l’accord de paix, a entraîné des réactions policières excessives; et vi) en raison de leur rôle de premier plan dans la grève susmentionnée, des dirigeants de la Fédération colombienne des travailleurs de l’éducation (FECODE) et de la CUT, dont le président de la CUT, M. Diógenes Orjuela, sont l’objet de menaces de mort de la part de groupes paramilitaires, mais les enquêtes correspondantes n’ont pas progressé.
En ce qui concerne les mesures de protection des dirigeants syndicaux en situation de risque, la commission note que la CUT et la CTC dénoncent la lenteur, le retard et le manque d’efficacité de ces mesures. Les centrales syndicales affirment spécifiquement ce qui suit: i) en 2019 et 2020, seulement 38 pour cent de l’ensemble des demandes de mesures de protection que des membres du mouvement syndical ont présentées pendant cette période ont été examinées; ii) dans un contexte de diminution du budget alloué à la protection des membres du mouvement syndical, les mesures de protection interrompues en 2019 représentent un peu plus de 50 pour cent de l’ensemble des mesures qui ont été maintenues; et iii) la participation réelle et effective des organisations syndicales au processus de détermination des mesures de protection a diminué peu à peu, notamment dans le cadre du Comité pour l’évaluation des risques et la recommandation de mesures (CERREM)
La commission note que, pour sa part, l’ANDI souligne à nouveau les efforts importants déployés par les institutions publiques tant pour protéger des membres du mouvement syndical que pour lutter contre l’impunité, ainsi que les résultats substantiels obtenus à cet égard.
La commission prend note des informations fournies par le gouvernement concernant le phénomène de la violence antisyndicale et les mesures institutionnelles prises pour y faire face. La commission note que, d’une manière générale, le gouvernement déclare que: i) s’il a accompli des progrès significatifs dans le domaine de la sécurité, il continue à être confronté à de nombreuses et graves difficultés, dues à la mutation et à la capacité d’adaptation des organisations criminelles et au maintien de conditions propices à leur multiplication et à leur renforcement; ii) grâce aux efforts énormes des différentes institutions publiques, l’État colombien a réduit significativement le nombre des actes de violence contre les membres du mouvement syndical, et le nombre d’homicides de syndicalistes a baissé de 84 pour cent entre 2001 et 2019; iii) de même, l’État a pu résorber l’impunité qui prévalait auparavant, 966 condamnations pour des actes de violence antisyndicale ayant été prononcées à ce jour, contre une seule en 2001; et iv) bien que tout acte de violence contre les travailleurs syndiqués soit réprouvé, une grande partie des homicides dont ont été victimes les syndicalistes ne sont pas dus à l’activité syndicale des victimes mais à la violence généralisée qui existe encore dans le pays.
La commission note qu’en ce qui concerne les initiatives institutionnelles prises pour atteindre les résultats susmentionnés, le gouvernement souligne à nouveau l’importance du Plan d’action opportune (PAO), adopté en 2018 pour articuler les programmes de protection et de ressources de l’ensemble des entités gouvernementales chargées d’assurer la protection des dirigeants syndicaux et sociaux et des défenseurs des droits de l’homme. La commission note que le gouvernement souligne également le rôle pertinent de la Commission interinstitutionnelle pour la promotion et la protection des droits de l’homme des travailleurs, dirigée par le ministère du Travail, qui réunit toutes les institutions publiques concernées et les partenaires sociaux. Le gouvernement déclare que, lors de sa réunion du 23 juillet 2020, la commission interinstitutionnelle a abordé de nombreuses questions relatives, entre autres, à la prévention et à la protection contre les actes de violence antisyndicale, aux sanctions prises contre les auteurs de ces actes, et aux relations entre les centrales ouvrières et la police, dans le cadre de l’exercice de la protestation sociale. Le gouvernement déclare que 80 pour cent des engagements pris pendant cette réunion, qui visent tous à protéger les droits fondamentaux des travailleurs, ont été respectés.
La commission prend note des informations spécifiques fournies par le gouvernement concernant la protection des membres du mouvement syndical en situation de risque, et selon lesquelles: i) en 2018, 447 évaluations des risques qu’encourent des membres du mouvement syndical ont été effectuées et ont permis de constater 280 cas de risques exceptionnels et 167 de risques ordinaires; ii) en 2019, 332 évaluations de ces risques ont été effectuées et ont permis de constater 206 cas de risques exceptionnels, un cas de risques extrêmes et 125 de risques ordinaires; iii) du 1er janvier au 31 août 2020, 190 évaluations des risques ont été effectuées sur des membres du mouvement syndical, déterminant 109 cas de risques exceptionnels, 3 cas de risques extrêmes et 78 de risques ordinaires; iv) l’Unité nationale de protection (UNP) protège actuellement 298 dirigeants et militants syndicaux; et v) les dépenses estimées au titre des mesures de protection des membres du mouvement syndical se sont élevées à 42 889 000 054 pesos colombiens en 2018 (environ 12 081 623 USD), et à 39 986 188 070 pesos colombiens en 2019 (environ 11 262 552 USD). La commission note également que, en réponse aux observations de la CUT et de la CTC, le gouvernement indique que: (i) toutes les demandes de protection ne donnent pas lieu à une évaluation exhaustive du niveau de risque, puisque l’UNP vérifie d’abord que les demandes sont conformes aux exigences minimales établies par le décret 1066 de 2015; (ii) en 2019, 87 pour cent des mesures de sécurité établies l’année précédente ont été maintenues; et (iii) les espaces interinstitutionnels de protection, tels que le CERREM, où les confédérations syndicales sont invitées, continuent d’être pleinement opérationnels. La commission note que le gouvernement déclare finalement que l’émergence de nouveaux facteurs de menaces a rendu nécessaire, en 2019, le renforcement des mécanismes et des stratégies de protection des dirigeants sociaux et des défenseurs des droits de l’homme.
En ce qui concerne la lutte contre l’impunité, la commission note que le gouvernement indique expressément que: i) le ministère public (Fiscalía General de la Nación (FGN)) poursuit sa stratégie d’enquête et de poursuite judiciaire des délits contre des syndicalistes par l’intermédiaire du Groupe Elite constitué en 2016 qui est chargé de la conduite et du suivi des enquêtes sur ces cas; ii) simultanément, le ministère public, sur la base de la directive 002 du 30 novembre 2017, a mis en œuvre une stratégie d’enquête et de poursuite judiciaire des crimes contre les défenseurs des droits de l’homme, renforcée depuis 2020 en terme de ressources humaines, logistiques et scientifiques, et il existe à cet égard une interrelation entre les deux stratégies étant donné qu’un travailleur syndiqué engagé dans des activités de défense des droits de l’homme est considéré comme un défenseur des droits de l’homme);iii) sur 216 cas d’homicides de membres du mouvement syndical ayant fait l’objet d’enquêtes entre 2011 et 2020, la FGN a pu éclaircir 42,59 pour cent de ces cas ( 60 condamnations ont été prononcées à propos de 41 cas, 30 cas sont en instance de jugement, dix cas ont donné lieu à des inculpations, six cas en sont au stade de l’enquête avec mandats d’arrêt émis, et les poursuites ont été abandonnées dans deux cas); et iv) les tribunaux colombiens ont rendu en tout 966 sentences sur des actes de violence antisyndicale, dont 815 sur l’homicide de membres du mouvement syndical (dont 525 ont été rendues entre 2011 et 2020).
La commission prend également note des informations fournies par le gouvernement sur 34 homicides commis en 2018 et dénoncés par la CSI en 2019, qui indiquent ce qui suit: i) 21 cas en sont au stade de l’enquête, huit en instance de jugement, quatre ont donné lieu à des décisions judiciaires, et un cas a été classé; et ii) sur ces 34 plaintes pour homicide, 19 sont enregistrées dans le cadre de la stratégie d’enquête et de poursuite judiciaire des crimes contre des défenseurs des droits de l’homme (dont 9 dirigeants syndicaux). La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations détaillées sur les progrès réalisés dans les enquêtes sur ces cas.
La commission prend également note des commentaires du gouvernement sur les observations de la CUT et de la CTC concernant la réponse des autorités à la grève nationale de novembre 2019 et les actes antisyndicaux qui ont touché plusieurs dirigeants syndicaux actifs dans le cadre de la grève susmentionnée. La Commission note que le gouvernement indique que: (i) le gouvernement a toujours respecté le droit de manifester, et un communiqué réitérant le droit constitutionnel de manifester pacifiquement a été signé lors de la session plénière du Comité permanent de coordination des politiques salariales et de l’emploi; (ii) le gouvernement a créé des espaces de dialogue avec les différents promoteurs de la grève; (iii) malgré les garanties fournies par le gouvernement, il y a eu quelques flambées de violence visant à déstabiliser la sécurité des citoyens; (iv) à la suite de l’attentat du 9 février 2020 dont il a été victime, l’ancien président de la FECODE, M. Carlos Rivas, a bénéficié de mesures de sécurité personnelle d’urgence complètes à partir du 19 février 2020; et (v) le président de la CUT, M. José Diógenes Orjuela, bénéficie également de mesures de sécurité personnelle complètes.
La commission reconnaît à nouveau les efforts considérables déployés par les pouvoirs publics, tant en termes de protection des membres du mouvement syndical en situation de risque que d’éclaircissement et de sanction des actes de violence antisyndicale. À cet égard, la commission se félicite à nouveau tout particulièrement de l’engagement actif des différents organes compétents de l’État, des initiatives prises pour renforcer l’efficacité de l’action de l’État par la coordination interinstitutionnelle, et de la consultation des partenaires sociaux au sein de la Commission interinstitutionnelle des droits de l’homme. La commission prend note en particulier des 815 condamnations prononcées dans des cas d’homicide de syndicalistes depuis 2001 et de l’augmentation substantielle du nombre de ces condamnations depuis 2016.
Toutefois, la commission exprime sa profonde préoccupation face à la persistance du nombre important d’homicides de membres du mouvement syndical et d’autres actes de violence antisyndicale dans le pays, ainsi que de menaces de mort contre des dirigeants syndicaux nationaux et locaux, dans un contexte de nombre en hausse d’agressions à l’encontre des dirigeants sociaux en général. La commission prend particulièrement note des indications des centrales syndicales selon lesquelles les syndicats des secteurs de l’agriculture, de l’éducation, de l’énergie et des mines sont particulièrement touchés. La commission note aussi que le gouvernement et les centrales syndicales font état des mutations en cours dans l’origine de la violence antisyndicale. Consciente de la complexité des difficultés auxquelles sont confrontés les organes chargés des enquêtes pénales, la commission ne peut néanmoins que constater à nouveau l’absence de données sur le nombre de condamnations prononcées contre les auteurs intellectuels des actes de violence antisyndicale, et souligne une fois de plus à cet égard l’importance cruciale que revêt l’identification et la condamnation des auteurs intellectuels de ces crimes pour éviter que ne se reproduise la violence antisyndicale. Compte tenu de l’ampleur des difficultés décrites et reconnaissant les actions importantes menées par les pouvoirs publics, la commission exhorte le gouvernement à continuer de renforcer son action et ses ressources pour assurer une protection appropriée à tous les dirigeants syndicaux et syndicalistes en situation de risque, ainsi qu’à leurs organisations, en accordant toute l’attention et les ressources financières nécessaires aux secteurs les plus touchés par la violence antisyndicale. Soulignant l’augmentation significative du nombre de sentences rendues, la commission prie également instamment le gouvernement de continuer à prendre toutes les mesures nécessaires pour que tous les actes de violence antisyndicale, les homicides et autres actes qui ont eu lieu dans le pays soient élucidés et pour que leurs auteurs, tant matériels qu’intellectuels, soient condamnés. La commission espère en particulier que toutes les mesures supplémentaires seront prises et que toutes les ressources indispensables seront consacrées afin que les enquêtes et les procédures pénales menées soient sensiblement plus efficaces pour identifier et punir les auteurs intellectuels des actes de violence antisyndicale. La commission prie le gouvernement de donner des informations détaillées à ce sujet. Enfin, la commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les allégations des centrales syndicales concernant les actes d’«espionnage» (tel que des filatures) présumés à l’encontre d’un certain nombre de dirigeants syndicaux.
Mesures de réparation collective en faveur du mouvement syndical. Dans son commentaire précédent, la commission avait noté avec intérêt la création du Bureau permanent de concertation pour l’octroi d’une réparation collective au mouvement syndical. La commission avait prié le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les travaux du bureau permanent et sur la mise en œuvre pratique de mesures collectives de réparation en faveur du mouvement syndical touché par la violence. La commission note que le gouvernement déclare que: i) le 29 novembre 2019, le bureau permanent a tenu sa deuxième réunion et a convenu de son fonctionnement et des actions nécessaires pour avancer dans le processus dans le cadre duquel le Défenseur du peuple entendra les déclarations du mouvement syndical, étape fondamentale pour inscrire au Registre unique des victimes le mouvement syndical en tant que sujet collectif; ii) le Défenseur du peuple, la CUT, la CGT, la CTC et la FECODE se sont réunis en décembre 2019 pour examiner les informations dont dispose le mouvement syndical pour faire cette déclaration; iii) à la demande du mouvement syndical, la troisième réunion du Bureau a été reportée deux fois, afin de permettre la tenue d’une autre réunion préparatoire du mouvement syndical avec le Défenseur du peuple et l’Unité d’aide aux victimes; iv) la troisième réunion du Bureau a eu lieu virtuellement le 23 avril et le 4 mai 2020 avec la direction de l’Unité d’aide aux victimes;; v) comme convenu lors de la 3e réunion du Bureau, deux réunions techniques ont ensuite été organisées avec le mouvement syndical en juillet et septembre 2020 pour examiner les progrès réalisés dans la systématisation de l’information; vi) les différentes réunions mentionnées ont permis de recruter le personnel technique nécessaire pour avancer dans le processus; et vii) l’Unité d’aide aux victimes gère la 4e réunion du Bureau depuis octobre 2020, dans l’attente d’une réponse du mouvement syndical pour arrêter une date. La commission note que le gouvernement exprime à nouveau sa volonté politique d’accorder une réparation au mouvement syndical et souligne l’importance que celui-ci fasse la déclaration susmentionnée au Défenseur du peuple pour poursuivre la procédure légale.
La commission note également que, de leur côté, la CUT et la CTC affirment que: i) depuis qu’a été effectué le protocole de mise en place du bureau permanent, celui-ci ne s’est pas réuni à nouveau et, un an après sa mise en place, il n’a progressé dans aucune des fonctions qui lui ont été assignées, faute d’initiative et de volonté politique du gouvernement; ii) malgré la pandémie, le processus aurait pu se poursuivre virtuellement; iii) le personnel technique nécessaire pour avancer dans le processus n’a pas été recruté; et iv) le bureau permanent doit également agir pour faciliter la déclaration formelle des organisations syndicales devant le Défenseur du peuple.
Prenant note des positions respectives du gouvernement et des centrales syndicales sur le travail effectué par le bureau permanent en 2020, la commission s’attend à ce que les mesures de réparation collective en faveur du mouvement syndical soient rapidement mises en place, compte tenu de la violence dont il fait l’objet. La commission prie le gouvernement de continuer à donner des informations sur cette question.
Article 200 du Code pénal. Dans son commentaire précédent, la commission avait pris note des informations fournies par le gouvernement sur l’effet des initiatives législatives et institutionnelles visant à faciliter la mise en œuvre de l’article 200 du Code pénal, qui prévoit des sanctions pénales pour une série d’actes contraires à la liberté syndicale et à la négociation collective. La commission avait noté en particulier que, comme suite à la procédure pénale spécifique accélérée qu’a instituée la loi n° 1826 du 12 janvier 2017, et grâce au plan de travail conjoint établi depuis août 2016 par la FGN et le ministère du Travail, 86 pour cent des 2 530 cas de violation supposée de l’article 200 avaient été examinés. La commission avait également pris note des allégations de la CUT, de la CTC et de la CGT selon lesquelles une impunité totale prévalait en ce qui concerne l’application de cet article, puisqu’aucune condamnation n’avait été prononcée. La commission avait également pris note de la réponse du gouvernement à cet égard, qui indiquait que 10 cas en étaient au stade du procès, illustrant ainsi l’absence d’impunité.
La commission note que le gouvernement et l’ANDI fournissent des informations actualisées sur les résultats des enquêtes sur les violations présumées de l’article 200 du Code pénal. Le gouvernement déclare que, sur les 2 727 cas de possible violation de l’article 200 du Code pénal enregistrés par la FGN entre 2011 et le 20 octobre 2020, 91,024 pour cent ont été conclus et seuls 8.98 pour cent en sont encore au stade de l’enquête. Le gouvernement déclare en outre que la conclusion des affaires susmentionnées est due: i) à la clôture de la procédure pénale (1 363 affaires, et dans 61,78 pour cent d’entre elles il a été établi qu’il n’y avait pas eu de comportement criminel); ii) à la clôture de la procédure pénale en raison de la péremption ou de l’extinction de la plainte (520 cas); iii) au désistement du travailleur ou de l’organisation syndicale (441 cas); et iv) aux conciliations (158 cas, dont le nombre a considérablement augmenté depuis août 2016). La commission note également que le gouvernement est en désaccord avec les déclarations des centrales syndicales concernant l’impunité des actes contraires à l’article 200, puisque plus de 90 pour cent des enquêtes ont été menées à bien et que leurs résultats ont été présentés au Comité interinstitutionnel des droits de l’homme, qui est dirigé par le ministère du Travail et auquel participent les centrales ouvrières.
La commission note que la CUT et la CTC, pour leur part, déclarent que les chiffres fournis par le gouvernement n’incluent pas les données correspondant aux inculpations et à la poursuite judiciaire des cas, qui sont des éléments nécessaires pour évaluer l’efficacité concrète des enquêtes sur les délits commis en violation de l’article 200 du Code pénal. Les centrales syndicales ajoutent que les résultats de l’efficacité de l’article 200 n’ont pas été portés à la connaissance du mouvement syndical au cours de 2020 et qu’aucune réunion de concertation n’a été organisée sur ce sujet.
Tout en se félicitant à nouveau du nombre croissant de cas ayant donné lieu à une conciliation et observant que, dans ses réponses aux observations de la CUT et de la CTC, le gouvernement se réfère à l’existence de huit affaires actuellement devant les tribunaux, la commission continue de constater l’absence de sanctions pénales pour les violations de l’article 200 du Code pénal, malgré le nombre très élevé de plaintes pénales déposées à cet égard depuis 2011. Compte tenu de ce qui précède, la commission prie à nouveau le gouvernement de procéder, avec le ministère public et les partenaires sociaux, à l’évaluation de l’efficacité de l’article 200 du Code pénal, et d’indiquer les résultats obtenus et les mesures éventuellement prises en conséquence.
Articles 2 et 10 de la convention. Contrats syndicaux. En ce qui concerne le contrat syndical, figure contractuelle prévue dans la législation colombienne en vertu de laquelle un ou plusieurs syndicats de travailleurs s’engagent à fournir des services ou à effectuer des travaux, par l’intermédiaire de leurs membres, pour une entreprise ou un syndicat d’employeurs, ou pour plusieurs entreprises ou syndicats d’employeurs, la commission rappelle que, les années précédentes, elle avait prié le gouvernement de communiquer ses commentaires sur les observations de la CUT et de la CTC selon lesquelles le contrat syndical constituait un outil pour perpétuer et étendre l’intermédiation illégale du travail, et pour dénaturer l’activité syndicale en créant de fausses organisations syndicales.
La commission rappelle à cet égard que, dans son dernier commentaire, elle avait pris note de: i) la déclaration du gouvernement selon laquelle le contrat syndical est une figure reconnue par la législation validée par les hautes juridictions du pays, qui permet aux syndicats de participer à la création d’emplois, avec des garanties pour éviter l’utilisation abusive du contrat syndical par de faux syndicats, grâce aux dispositions du décret 0636 de 2016 et au contrôle de l’inspection du travail en ce qui concerne l’intermédiation du travail; ii) la position similaire de l’ANDI, qui souligne en outre qu’il faut respecter l’autonomie des organisations syndicales pour conclure ou non des contrats syndicaux; iii) la position répétée de la CUT et de la CTC selon laquelle le contrat syndical nuit à la finalité et à l’autonomie des organisations syndicales, empêche l’exercice effectif des droits syndicaux par les travailleurs et permet de continuer à exercer des activités illégales d’intermédiation du travail, notamment dans le secteur de la santé; et iv) la position de la CGT selon laquelle, bien que le contrat syndical puisse être une figure juridique valide pour les syndicats forts, dans la pratique un nombre important de coopératives de travail associé se sont constitués en faux syndicats pour signer des contrats syndicaux, en particulier dans le secteur de la santé.
La commission rappelle que, sur la base des éléments susmentionnés: i) elle avait noté que, dans le contexte très particulier du contrat syndical, par lequel un syndicat est directement responsable, au moyen de ses membres, d’une activité productive pour une entreprise, le syndicat est chargé d’organiser le travail de ses membres et de leur accorder les prestations correspondant au travail effectué; ii) que le gouvernement et les trois centrales syndicales nationales (CUT, CTC et CGT) avaient convenu que plus de 98 pour cent des contrats syndicaux étaient concentrés dans le secteur de la santé; et iii) elle avait constaté avec une profonde préoccupation que les trois centrales déclaraient que des coopératives de travail associé, auparavant responsables d’activités illicites d’intermédiation du travail, auraient pris la forme de faux syndicats afin de poursuivre ces activités au moyen de contrats syndicaux. Compte tenu de ce qui précède, la commission avait souligné que l’exercice par un syndicat de travailleurs d’un pouvoir de gestion et de décision sur l’emploi de ses affiliés est susceptible de générer un conflit d’intérêts avec sa fonction de défense de leurs intérêts professionnels. La commission avait donc prié le gouvernement de contrôler de près l’utilisation du contrat syndical, en particulier dans le secteur de la santé, et de prendre les mesures nécessaires pour garantir que la figure du contrat syndical ne porte pas atteinte aux droits syndicaux des travailleurs.
La commission note que le gouvernement réitère ce qu’il a déclaré en 2019 et qu’il souligne que: i) le contrat syndical permet aux syndicats de participer à la gestion des entreprises et à la promotion de l’emploi; ii) dans le cadre du contrat syndical, deux types de relations apparaissent: l’une entre l’entreprise et le syndicat, qui est une forme des relations collectives réglementées par les normes collectives du travail; l’autre entre les membres du syndicat et le syndicat, qui est une relation spéciale, protégée en particulier par les garanties minimales et les principes constitutionnels fondamentaux du travail, sans constituer pour autant une relation de travail, puisque le contrat syndical n’a pas été créé pour faire du syndicat un nouveau type d’employeur; iii) les travailleurs qui sont parties à un contrat syndical sont déjà couverts par une convention collective, conclue par l’employeur et l’organisation syndicale; iv) les différentes dispositions du décret n° 036 de 2016, et notamment la règle selon laquelle un contrat syndical ne peut pas être conclu si l’organisation syndicale n’a pas été constituée au moins six mois avant la signature du contrat, empêchent de constituer une organisation syndicale dans le seul but de conclure immédiatement des contrats syndicaux; v) le ministère du Travail contrôle les cas qui sont dénoncés au motif d’une intermédiation illégale du travail, y compris ceux qui comportent l’utilisation abusive du contrat syndical; vi) le ministère du Travail est en train de mener à bien le processus d’adoption du plan d’action pour la «Politique publique de prévention, d’inspection, de surveillance et de contrôle du travail: Engagés en faveur du travail décent 2020-2030» adoptée le 20 février 2020; ce plan prévoira des actions visant à renforcer les libertés syndicales, ce qui inclut le contrôle de l’utilisation des contrats syndicaux; vii) 567 contrats syndicaux étaient en vigueur entre janvier et juin 2020, dont 95,8 pour cent dans le secteur de la santé; viii) 11 plaintes ont été enregistrées pour utilisation abusive du contrat syndical (sept en sont au stade de l’enquête préliminaire, trois au stade de l’inculpation et un au stade de la notification); ix) en ce qui concerne les visites d’inspection axées sur le contrôle des contrats syndicaux, les domaines des contrats syndicaux en vigueur ont été déterminés, en précisant le secteur économique, ces contrats étant concentrés dans les secteurs de la santé, de la manufacture et de l’agriculture; x) afin de parvenir à 20 pour cent de visites d’inspection concernant les contrats syndicaux en vigueur, l’accent a été mis sur les secteurs économiques de l’exportation; et xi) en raison de la pandémie, les visites d’inspection ont été suspendues, raison pour laquelle il n’y a pas de données disponibles sur les visites d’inspection portant sur les contrats syndicaux pour la période de janvier à juin 2020. La commission constate que l’ANDI exprime à nouveau une position similaire à celle du gouvernement, et qu’elle souligne une fois de plus qu’il faut respecter l’autonomie des organisations syndicales pour conclure des contrats syndicaux, comme le fait par exemple la centrale syndicale CGT.
La commission constate enfin que la CUT et la CTC rappellent dans leurs dernières observations que la figure juridique du contrat syndical, qui suppose qu’une entreprise verse des fonds supplémentaires à l’organisation syndicale: i) dénature la raison pour laquelle les organisations syndicales sont constituées; et ii) limite l’autonomie des organisations syndicales par rapport à l’entreprise et dissimule la nature de l’employeur réel. La commission note que les deux centrales syndicales déclarent en outre que: i) la prolifération des contrats syndicaux persiste, 567 contrats syndicaux ayant été déposés entre janvier et juin 2020; ii) à ce jour, le gouvernement national n’a donné suite à aucune proposition de réforme réglementaire pour limiter leur utilisation, et il a encore moins permis de proposer une réforme qui les éliminerait de la législation colombienne; iii) l’inspection du travail a été réticente à la possibilité d’envisager une enquête sur les contrats syndicaux dans le cadre de la procédure d’intermédiation illégale du travail et, lorsqu’elle effectue des visites d’inspection, elle se limite aux conditions formelles requises pour la signature et la validité du contrat syndical; et iv) à ce jour, aucune sanction n’a été prise contre l’un quelconque des plus de 1 700 contrats syndicaux en vigueur dans le pays, lesquels sont conclus avec des syndicats prétendument indépendants et inconnus du véritable mouvement syndical.
La commission prend bonne note des informations fournies par le gouvernement et les partenaires sociaux sur la figure du contrat syndical. La commission constate que les différents acteurs réitèrent leurs positions respectives, et note qu’il n’y a pas eu de changements particuliers dans la législation ou la pratique. La commission note en particulier que l’utilisation du contrat syndical est encore concentrée, dans 95 pour cent des cas, dans le secteur de la santé. À ce sujet, tout en étant pleinement consciente des énormes obstacles que la pandémie de COVID-19 oppose aux activités de l’inspection du travail, la commission note que le gouvernement ne mentionne pas la priorité de planifier des activités pour contrôler l’utilisation du contrat syndical dans ce secteur. Compte tenu de ce qui précède, et soulignant à nouveau que l’attribution à un syndicat de travailleurs d’une capacité de gestion et de décision sur l’emploi de ses membres peut créer un conflit d’intérêts et mettre par conséquent en péril la capacité du syndicat d’assumer en même temps la responsabilité propre aux organisations syndicales, qui est d’appuyer et de défendre de façon indépendante les revendications de ses membres en ce qui concerne l’emploi et les conditions de travail, la commission prie le gouvernement: i) de planifier et d’effectuer, dans un avenir proche, un contrôle précis de l’utilisation du contrat syndical, en particulier dans le secteur de la santé; et ii) après avoir communiqué les résultats de ces contrôles aux partenaires sociaux, de prendre les mesures nécessaires, législatives le cas échéant, pour veiller à ce que la figure du contrat syndical ne porte pas atteinte aux droits syndicaux des travailleurs et ne soit pas utilisée à des fins incompatibles avec l’article 10 de la convention. La commission prie le gouvernement d’indiquer tout progrès réalisé à cet égard.
Article 4. Annulation par voie judiciaire de l’enregistrement d’un syndicat. Dans son commentaire précédent, la commission avait prié le gouvernement de communiquer ses commentaires sur les affirmations de la CUT et de la CTC selon lesquelles la procédure accélérée de l’article 380, paragraphe 2 du Code du travail ne fournirait pas les garanties de procédure suffisantes.
La commission note que le gouvernement indique les étapes et les délais de la procédure accélérée d’annulation de l’enregistrement des syndicats établie par le Code du travail. Le gouvernement déclare à ce sujet que: i) cette procédure judiciaire, qui reconnaît le droit de contester et prévoit un droit de recours avec effet suspensif de la décision de première instance, prévoit les garanties constitutionnelles de procédure régulière; ii) en ce qui concerne les allégations selon lesquelles certaines entreprises profiteraient de cette procédure pour violer la liberté syndicale, les juges statuent de manière indépendante après avoir analysé chaque cas individuel, de sorte qu’on ne peut déduire que les dissolutions d’organisations syndicales sont systématiques, et iii) dans son arrêt C-096/93, la Cour constitutionnelle a estimé que l’article 380 du Code du travail était conforme à l’article 4 de la convention, qui interdit la dissolution ou la suspension administrative des organisations syndicales. La commission note que, de leur côté, la CUT et la CTC affirment à nouveau que: i) les délais très courts établis par l’article 380, paragraphe 2, du Code du travail n’offrent pas de garanties de procédure suffisantes aux organisations syndicales; ii) plusieurs cas récents montrent que certaines entreprises utilisent le processus accéléré pour tenter d’éliminer des organisations syndicales en représailles de la cessation prétendument illégale d’activités; et iii) la CUT et la CTC demandent une révision du Code du travail afin de restreindre la possibilité actuelle de liquider des syndicats pour des raisons et au moyen de procédures incompatibles avec la convention.
La commission prend bonne note des éléments fournis par le gouvernement sur la procédure établie par l’article 380, paragraphe 2, du Code du travail et, en particulier, de l’existence d’un droit de recours avec effet suspensif. La commission note également que, dans leurs observations, les centrales syndicales ont jusqu’à présent fait référence aux actions en justice fondées sur l’article 380, paragraphe 2, mais non aux décisions de dissolution prononcées dans le cadre de cette procédure. Dans le même temps, la commission constate que: i) les délais fixés par l’article 380, paragraphe 2, pour que les syndicats faisant l’objet d’une action en dissolution présentent leur défense et, éventuellement, contestent une décision de première instance sont extrêmement courts (5 jours dans chaque cas); et ii) la CUT et la CTC dénoncent également les motifs pour lesquels la procédure accélérée de dissolution judiciaire du syndicat pourrait être engagée, notamment la cessation présumée illégale d’activités. Rappelant à nouveau que l’annulation de l’enregistrement d’un syndicat constitue une forme extrême d’intervention qui devrait être limitée aux violations graves de la loi, après avoir épuisé d’autres moyens moins drastiques pour l’organisation dans son ensemble, et qu’il est important que ces mesures s’accompagnent de toutes les garanties nécessaires que seule une procédure judiciaire normale peut assurer, la commission prie le gouvernement d’indiquer les raisons justifiant l’application des délais de procédure très courts fixés par l’article 380, paragraphe 2, du Code du travail, et d’indiquer également dans quelle mesure la réalisation d’une cessation d’activités, considérée comme illégale, peut constituer un motif de dissolution d’une organisation syndicale.
Articles 3 et 6. Droit des organisations de travailleurs d’organiser leur activité et de formuler leur programme d’action. Questions législatives. La commission rappelle que, depuis de nombreuses années, elle souligne la nécessité de prendre des mesures pour modifier la législation en ce qui concerne: i) l’interdiction pour les fédérations et les confédérations d’appeler à la grève (art. 417, alinéa i), du Code du travail) et l’interdiction de la grève dans toute une série d’activités qui ne sont pas nécessairement des services essentiels au sens strict du terme (art. 430, alinéas b), d), f) et h); art. 450, paragr. 1, alinéa a), du Code du travail; loi fiscale no 633/00; et décrets nos 414 et 437 de 1952; 1543 de 1955; 1593 de 1959; 1167 de 1963; 57 et 534 de 1967); et ii) la possibilité de licencier des travailleurs qui ont participé à une grève illégale ou sont intervenus dans une grève illégale (art. 450, paragr. 2, du Code du travail), y compris lorsque l’illégalité résulte de prescriptions contraires aux dispositions de la convention.
En ce qui concerne l’interdiction des grèves dans un certain nombre de services qui ne sont pas nécessairement essentiels au sens strict du terme, la commission note que le gouvernement fait observer tout d’abord que le droit de grève, même s’il s’agit d’un droit fondamental des syndicats, n’est pas un droit absolu et peut donc être soumis à des limitations comme dans le cas des services publics essentiels. La commission note ensuite que le gouvernement mentionne l’examen par la Chambre des représentants du projet de loi n° 071 de 2019, qui porte modification du Code du travail, afin d’harmoniser le droit de grève avec les conventions de l’OIT sur la liberté syndicale, projet qui a été soumis à la Chambre des représentants le 24 juillet 2019 et débattu pour la première fois le 17 février 2020. Le gouvernement indique que, dans l’avis qu’il a formulé sur le projet susmentionné, le ministère du Travail a jugé nécessaire que les services publics essentiels soient définis dans le projet et que le projet soit examiné par la Commission nationale de concertation des politiques salariales et du travail. À cet égard, la commission note que le gouvernement déclare qu’il n’existe actuellement aucun consensus tripartite sur les modifications législatives demandées par les centrales syndicales en matière de grèves et que, à cet égard, il convient de tenir compte aussi bien de la position des syndicats que de celle des organisations d’employeurs. .La commission note enfin que le gouvernement décrit en détail l’arrêt de la Cour suprême SL1680-2020 du 24 juin 2020 concernant une grève dans le secteur de la santé, et souligne que, dans cet arrêt, la Cour: i) indique que la grève n’est pas interdite dans l’ensemble du secteur de la santé, mais strictement et exclusivement dans les services dont l’interruption mettrait effectivement en danger la santé ou la vie des personnes; ii) modifie son approche et considère que la procédure prévue aux articles 444 et 445 du Code du travail - qui prévoient un certain nombre de conditions pour l’exercice du droit de grève - ne s’applique qu’aux grèves contractuelles, dont le but est de parvenir à la signature de conventions collectives; iii) considère que la procédure susmentionnée ne peut en revanche pas être appliquée à d’autres types de grèves, telles que celles imputables à l’employeur ou à des mesures politiques, ou les grèves de solidarité, dans la mesure où les articles 444 et 445 ont été adoptés avant la Constitution de 1991, à une époque où le législateur n’avait pas envisagé de grèves autres que contractuelles.
La commission note que, pour sa part, l’ANDI, après avoir exprimé l’avis que le droit de grève n’est pas couvert par la convention, déclare à nouveau que la législation et la jurisprudence colombiennes sur les grèves dans les services essentiels sont pleinement satisfaisantes et que le pays dispose d’un pouvoir judiciaire indépendant qui est chargé d’examiner chaque cas lorsqu’il y a des différends entre l’employeur et le travailleur. La commission note enfin que la CUT et la CTC font également référence dans leurs observations à l’arrêt SL1680-2020 et que, à cet égard, elles soulignent tout particulièrement que, par cet arrêt, la Cour suprême: i) reconnaît la grève en tant que droit humain fondamental; et ii) s’appuie sur la position des organes de contrôle de l’OIT pour déterminer si, dans le cas spécifique considéré, la cessation d’activités a effectivement mis en danger direct la vie, la santé ou la sécurité des personnes. La commission note que la CUT et la CTC affirment également ce qui suit: i) l’arrêt susmentionné n’est valable que pour les parties et, comme il émane d’un tribunal de cassation, il n’affecte pas la validité des règles légales en la matière; ii) à ce jour, aucune proposition n’a été faite par le gouvernement pour modifier les dispositions de la législation qui limitent et violent le droit de grève; et iii) bien que le projet de loi 071 de 2019, proposé par les centrales syndicales pour rendre la législation nationale sur le droit de grève conforme aux normes internationales de l’OIT, soit toujours en instance, les parlementaires favorables au gouvernement ont empêché que le projet de loi soit examiné et voté, et cherchent à ce qu’il soit classé pour la seconde fois.
La commission prend bonne note des éléments fournis par le gouvernement et les partenaires sociaux. La commission prend note avec intérêt de l’arrêt de la Cour suprême SL1680-2020 qu’ont transmis le gouvernement et les centrales syndicales, qui se fonde sur le caractère fondamental du droit de grève pour appliquer et interpréter les dispositions légales établissant ses conditions d’exercice et fixant ses limites. À cet égard, la commission rappelle que, dans son commentaire précédent, elle avait noté que tant la Cour constitutionnelle, pour le secteur des hydrocarbures, que la Cour suprême, pour les différents services définis comme essentiels par la législation, avaient demandé que la législation soit revue afin de mieux définir les limites imposées à l’exercice du droit de grève. La commission continue toutefois de constater qu’aucun progrès concret n’a encore été accompli en ce qui concerne les réformes législatives qu’elle a demandées au sujet des grèves dans les services essentiels. La commission rappelle son commentaire précédent sur ce sujet dans lequel elle indiquait ce qui suit: i) elle estime que seuls peuvent être considérés essentiels – aux fins de la restriction ou de l’interdiction du droit de grève – les services dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne; et ii) bien que la notion de services essentiels ne soit pas absolue, la commission a considéré que des secteurs comme celui des hydrocarbures et des transports publics ne sont pas des services essentiels au sens strict mais des services publics d’une importance primordiale qui peuvent exiger le maintien d’un service minimum. La commission exprime donc le ferme espoir que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour réviser dès que possible les dispositions législatives susmentionnées sur les services essentiels dans le sens indiqué ci-dessus. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès réalisé à cet égard et lui rappelle qu’il peut faire appel à l’assistance technique du Bureau.
En ce qui concerne l’article 417 du Code du travail, qui interdit aux fédérations et confédérations de déclencher une action de grève, la commission note que le gouvernement déclare que la vocation des fédérations et des confédérations n’est pas, à proprement parler, de prendre position sur un différend collectif de travail concernant une entreprise ou une activité économique particulière, mais de représenter et de promouvoir les intérêts des syndicats en général, sans l’intention d’exercer le droit de grève. La commission note que le gouvernement et l’ANDI se réfèrent également de nouveau aux arrêts C-797 de 2000 et C-018 de 2015 dans lesquels la Cour constitutionnelle a souligné que les fédérations et les confédérations exercent des fonctions consultatives pour leurs organisations affiliées et que, dans le contexte d’un différend économique qui est porté à la connaissance de l’employeur par le biais d’un cahier de revendications, il est constitutionnellement justifié que les fédérations et les confédérations soient exclues de la décision de déclarer la grève.
Constatant par ailleurs les critiques persistantes exprimées par les centrales syndicales nationales et internationales à l’égard de l’interdiction prévue à l’article 417 de la Code du travail, la commission rappelle à nouveau que, en vertu de l’article 6 de la convention, les garanties des articles 2, 3 et 4 s’appliquent pleinement aux fédérations et aux confédérations, lesquelles doivent donc pouvoir formuler librement leur programme d’action. De plus, la commission souligne que, en vertu du principe d’autonomie syndicale énoncé à l’article 3 de la convention, il n’appartient pas à l’État de déterminer les rôles respectifs des syndicats de base et des fédérations et confédérations auxquelles ils appartiennent. La commission souligne enfin que, comme le souligne l’arrêt 1680 de 2020 de la Chambre du travail de la Cour suprême, largement décrit par le gouvernement dans son rapport, le droit de grève ne se limite pas aux différends collectifs concernant la négociation d’une convention collective à l’échelle d’une entreprise et, par conséquent, dans les cas où la défense des intérêts collectifs des travailleurs dépasse le cadre d’une seule entreprise, il est particulièrement important de reconnaître aux fédérations et aux confédérations l’exercice de toutes les garanties prévues par la convention. Compte tenu de ce qui précède, la commission prie à nouveau le gouvernement de prendre dès que possible les mesures nécessaires pour réviser l’article 417 du Code du travail, qui interdit l’exercice du droit de grève aux fédérations et aux confédérations. La commission prie le gouvernement d’indiquer tout progrès réalisé à cet égard.
Enfin, la commission prend note des informations fournies par le gouvernement sur l’examen, par la sous-commission des affaires internationales de la Commission permanente de concertation des politiques salariales et du travail, de certaines des questions mentionnées dans le présent commentaire. La commission exprime à nouveau l’espoir que les travaux de la sous-commission permettront d’accélérer l’adoption des diverses mesures demandées par la commission pour donner pleinement effet à la convention. La commission rappelle que le gouvernement peut demander l’assistance technique du Bureau à cette fin.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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