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Forced Labour Convention, 1930 (No. 29) - Niger (RATIFICATION: 1961)
Protocol of 2014 to the Forced Labour Convention, 1930 - Niger (RATIFICATION: 2015)

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La commission salue la ratification par le Niger du Protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930, qui témoigne de l’engagement du gouvernement à prévenir et éliminer toutes les formes de travail forcé.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention et article 1, paragraphe 1 du protocole. Mesures efficaces pour lutter contre l’esclavage et les pratiques assimilées. 1. Action systématique et coordonnée. La commission examine la question de la persistance de pratiques esclavagistes au Niger depuis de nombreuses années. La commission a salué l’engagement du gouvernement à lutter contre ces pratiques, notamment à travers l’assistance technique du Bureau prodiguée dans le cadre du Projet d’appui à la lutte contre le travail forcé et la discrimination (PACTRAD). Néanmoins, tout en notant l’existence d’un cadre législatif incriminant l’esclavage, la commission a observé que l’institution initialement établie pour coordonner la lutte contre les pratiques esclavagistes – la Commission nationale de lutte contre les survivances du travail forcé et la discrimination – ne disposait pas des moyens pour s’acquitter de ses fonctions. La commission a considéré que le gouvernement devait intensifier ses efforts pour mettre fin aux pratiques esclavagistes et prendre les mesures nécessaires pour adopter une stratégie nationale de lutte contre l’esclavage.
Dans son rapport, le gouvernement indique qu’il a opté pour un plan global de lutte contre la traite des personnes et le travail forcé en renforçant la présence du ministère en charge du travail au sein de la Commission nationale de lutte contre la traite des personnes (CNLTP) et en impliquant davantage les partenaires sociaux. Il se réfère en outre aux activités menées dans le cadre du projet PACTRAD II dont l’objectif général est de contribuer à une réduction significative du nombre de victimes de travail forcé, avec pour objectif immédiat l’élimination progressive des vestiges de l’esclavage. Dans ce contexte, des réunions techniques d’échange ont été organisées afin que les différents acteurs disposent d’une meilleure connaissance des priorités et des modalités d’intervention réciproques de chacun d’entre eux.
La commission prend note de ces informations. Tout en notant l’indication du gouvernement selon laquelle il adopte une approche globale de lutte contre la traite des personnes et le travail forcé dans le cadre de la Commission nationale de lutte contre la traite des personnes, la commission rappelle que les phénomènes de traite des personnes et de survivances de l’esclavage renferment des caractéristiques propres qui requièrent des actions spécifiques différentes. La lutte contre la traite des personnes a été définie et encadrée dans l’ordonnance no 2010 86 du 16 décembre 2010 relative à la lutte contre la traite des personnes et fait l’objet d’un plan national d’actions mis en œuvre par l’Agence nationale de lutte contre la traite des personnes et le trafic illicite de migrants (ANLTP/TIM) (voir à cet égard les commentaires formulés par la commission dans sa demande directe). Les crimes et délits d’esclavage ont été introduits dans le Code pénal en 2003 sans qu’ait été mis en place une stratégie globale de lutte contre ces pratiques. La commission a déjà souligné la complexité des facteurs qui sont à l’origine de la persistance des pratiques esclavagistes et la nécessité d’y répondre de manière spécifique. La commission prie par conséquent instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour adopter une politique nationale et un plan d’action de lutte contre l’esclavage et les pratiques esclavagistes qui permettront d’assurer une action systématique et coordonnée de la part des autorités compétentes et de déterminer les objectifs à atteindre et les mesures à prendre. Prière d’indiquer à cet égard la manière dont les organisations d’employeurs et de travailleurs sont consultées. La commission prie en outre le gouvernement d’indiquer quelle sera l’autorité compétente pour la mise en œuvre de cette politique et de préciser les mesures prises pour que celle-ci dispose des moyens pour mener à bien ses fonctions sur l’ensemble du territoire.
2. Article 2 du protocole. Prévention. Sensibilisation, éducation et information (alinéas a) et b)). La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement sur les activités de formation et de sensibilisation organisées dans le cadre du projet PACTRAD II à l’attention notamment des chefs traditionnels, des journalistes de la presse publique et privée, des milieux universitaires et de l’École nationale d’administration en vue de favoriser un changement de mentalité et de comportement. Elle relève que suite à une formation théorique et pratique dispensée à l’Association des chefs traditionnels du Niger (ACTN), cette dernière s’est dotée d’un Plan d’actions de lutte contre le travail forcé et les pratiques assimilées. La commission note par ailleurs que le gouvernement indique que, dans le cadre du projet de coopération technique Bridge, il est envisagé que l’ANLTP/TIM mène des études sur l’état des lieux de l’esclavage dans les localités où existent encore des survivances esclavagistes, en vue d’adopter une stratégie de lutte contre l’esclavage.
La commission rappelle que le fait de disposer de données fiables sur la nature et la prévalence des pratiques esclavagistes au Niger constitue un élément préalable essentiel. Elle encourage vivement le gouvernement à prendre les mesures nécessaires afin de mener à bien, avec l’assistance du Bureau, une étude sur l’état des lieux de l’esclavage et des pratiques esclavagistes qui permettra de mieux appréhender les caractéristiques de ces pratiques et notamment le caractère multidimensionnel de la relation existant entre les victimes et leur maître. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les activités de sensibilisation menées auprès des différentes autorités compétentes et acteurs concernés ainsi que de la population. Prière de préciser comment ces activités ciblent les zones et les populations à risque.
Lutte contre les causes profondes de l’esclavage (alinéa f )). La commission salue les différentes actions menées dans le cadre du projet PACTRAD II pour appréhender les causes profondes de l’esclavage. Elle note en particulier les mesures prises ayant permis de créer des écoles communautaires (MODECOM) dans les zones où sont établies des communautés d’ascendance esclave afin de promouvoir leur émancipation; l’organisation d’une campagne foraine d’établissement d’actes de naissance et de pièces d’état civil pour lutter contre la marginalisation de ces populations en leur permettant d’accéder à leurs droits (droit de vote, éducation et autres services); les opérations d’appui à l’autonomisation de ménages d’origine servile dans la commune de Tajaé.
La commission prie le gouvernement de continuer à prendre des mesures pour s’attaquer aux causes profondes des survivances de pratiques esclavagistes, en précisant dans quel cadre les activités sont menées et la manière dont elles sont coordonnées. Elle le prie de préciser si des programmes sont spécifiquement destinés aux anciens esclaves ou descendants d’esclaves afin de leur assurer des moyens de subsistance suffisants pour ne pas se retrouver dans une situation de dépendance propice à l’exploitation de leur travail. À cet égard, la commission renvoie également aux commentaires formulés sous la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, dans lesquels elle a souligné l’importance de «lutter contre la discrimination et la stigmatisation dont sont victimes les anciens esclaves et les descendants d’esclaves, y compris dans l’accès aux ressources productives telles que la terre, afin de leur permettre d’occuper un emploi ou d’exercer leurs activités librement».
3. Article 3 du protocole. Identification et protection des victimes. S’agissant de l’identification et de la protection des victimes, la commission observe que les informations communiquées par le gouvernement concernent principalement des mesures prises ou envisagées pour les victimes de traite des personnes. Elle souligne à cet égard que les victimes d’esclavage se trouvent dans une situation de dépendance économique et psychologique qui appelle des actions spécifiques de l’ensemble des acteurs de la société pour détecter les cas d’esclavage et aider les victimes à sortir de leur situation de dépendance. La commission prie par conséquent le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que les victimes d’esclavage sont identifiées et libérées et qu’elles bénéficient d’une protection adaptée à leur situation afin de pouvoir se reconstruire en dehors de la relation esclave-maître. La commission prie en outre le gouvernement de fournir des informations sur les situations dénoncées, le nombre de victimes potentielles identifiées, celles qui ont bénéficié d’une protection, la nature de cette protection et les entités qui ont prodigué cette assistance.
4. Article 4 du protocole. Accès à la justice et réparation. La commission a précédemment noté que le Code pénal habilite toute association ayant comme objectif de combattre l’esclavage ou les pratiques analogues à exercer l’action civile en réparation des dommages causés dans le cadre des infractions liées à l’esclavage (art. 270-5). Elle a également noté que les personnes vulnérables ou ne disposant pas des revenus nécessaires peuvent bénéficier d’un dispositif d’assistance juridique et judiciaire géré par l’Agence nationale de l’assistance juridique et judiciaire. Le gouvernement a indiqué que cette assistance constitue une avancée significative pour permettre aux victimes de voir leurs droits rétablis. La commission prie une nouvelle fois le gouvernement d’indiquer comment dans la pratique l’assistance juridique est effectivement octroyée aux personnes identifiées comme pouvant être des victimes d’esclavage. Elle le prie d’indiquer comment les différents acteurs (associations de la société civile, forces de l’ordre et Agence nationale d’assistance juridique et judiciaire) coopèrent pour s’assurer que les victimes sont effectivement en mesure de faire valoir leurs droits et accéder à la justice. La commission prie également le gouvernement de s’assurer que les victimes ont facilement accès à des mécanismes appropriés de réparation et d’indemnisation de l’ensemble des préjudices qu’elles ont subi.
5. Article 25 de la convention et article 1, paragraphe 1, du protocole. Application de sanctions pénales efficaces. La commission a relevé que, depuis l’adoption des dispositions incriminant l’esclavage en 2003 (loi no 2003-025 du 13 juin 2003 qui a inséré dans le Code pénal les articles 270-1 à 270-5 relatifs à l’esclavage), très peu d’informations ont été communiquées sur les poursuites judiciaires engagées et les sanctions prononcées à l’encontre de ceux qui pratiquent l’esclavage. Le gouvernement se réfère à plusieurs activités de formation réalisées entre 2013 et 2017 au sein des forces de défense et de sécurité dans le cadre de modules de formation sur les droits de l’homme, ainsi qu’à des activités de sensibilisation des acteurs de la chaine pénale concernant la traite des personnes. La commission prend note de ces informations et insiste une nouvelle fois sur la nécessité de mener des activités plus ciblées sur la thématique de l’esclavage et les dispositions législatives y relatives. La commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour renforcer les activités de sensibilisation et de renforcement des capacités des forces de l’ordre, des autorités de poursuite et des autorités judiciaires afin de s’assurer que les cas d’esclavage sont identifiés, les preuves réunies et les procédures judiciaires initiées de manière à ce que les auteurs de telles pratiques soient sanctionnés conformément aux articles 270-1 à 270-5 du Code pénal. La commission prie le gouvernement de fournir, dans son prochain rapport, des informations détaillées à cet égard.
La commission note qu’un nouveau projet de coopération technique du Bureau (Projet BRIDGE) est mis en œuvre depuis le début de l’année 2020 et que, parmi ses objectifs, figurent l’appui à l’élaboration d’un plan national de lutte contre l’esclavage et pratiques assimilées ainsi qu’au renforcement d’un mécanisme de coordination. Ce plan englobe également des activités visant à sensibiliser à cette problématique et à l’inclusion des victimes d’esclavage dans les projets favorisant leur autonomisation et leur insertion sociale. La commission espère que l’assistance du Bureau permettra d’accompagner le gouvernement dans la mise en œuvre des recommandations qui précèdent.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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