Être une femme dans un milieu professionnel largement dominé par les hommes

Binte Diallo a 25 ans, elle a été formée en topographie dans le cadre du projet PROMOPECHE, financé par l’Union européenne. Ce projet vise la création d’emplois décents et à la consolidation de l’emploi existant pour les jeunes et potentiels migrants dans le secteur de la pêche artisanale. Aujourd’hui elle participe à la construction du Point de Débarquement Aménagé au PK93.

Actualité | 23 mars 2023
Elle raconte son histoire et donne son avis sur le rôle des femmes et leur place dans le secteur du Bâtiment et Travaux Publics.

« En tant que femme travaillant dans le domaine de la construction qui est fortement dominé par les hommes, je dois redoubler d’effort pour m’imposer, ce travail demande une force physique et morale. Mais cela ne constitue en aucun cas un frein pour les femmes qui désirent travailler dans ce secteur. Moi c’est la passion de mon métier qui me pousse et m’aide à dépasser la pression sociale et familiale.»

Je me sens vraiment impliquée et utile dans l’avancement des travaux de construction que ça soit l’implantation (identification de l’emplacement choisi pour une construction par rapport aux limites du terrain), la levée des mesures etc. J’ai toujours quelque chose à faire. Je suis la seule femme topographe qualifiée sur le chantier, car j’ai été formée dans les appareils les plus modernes, du coup j’interviens chaque fois qu’ils doivent prendre les mesures ou réaliser des levés topographiques de terrains (opération technique qui vise à capturer une situation géographique à un temps donné, en collectant des données).

Sincèrement, je ne saurai pas dire comment, je suis devenue aide topographe, je pense que c’est la conjugaison de plusieurs facteurs et de circonstances, mais j’ai découvert ce métier, je me suis formée, je me suis investie, aujourd’hui chaque jour est un défi pour prouver que je suis à ma place et c’est ça mon combat personnel.

Les femmes sont déterminées et endurantes, il n’y a pas de doute sur le fait qu’elles aient leur place parmi les hommes dans les chantiers de constructions en Mauritanie.

Je sais que les hommes sont encore réticents issants et que quelque part c’est comme s’ils ressentent de la pitié à notre égard, je remarque ça lors du partage des taches à faire sur les chantiers, pensant que je suis faible ils évitent de me donner certains travaux qu’ils jugent très pénibles. Mais ils oublient que j’ai fait la même formation de topographe que les hommes dans le cadre du projet promopêche du BIT sous le même soleil et avec les mêmes difficultés.

Il a fallu être persévérant pour leur prouver que je suis capable de faire les mêmes tâches comme tous les autres stagiaires sur le chantier.

C’est une chance et une opportunité pour moi de travailler dans un chantier aussi important que la construction d’une école, d’un poste de santé et d’un point de débarquement aménagé, je côtoie ainsi beaucoup de personnes très expérimentées et j’apprends énormément de choses avec elles. Et d’un autre côté, j’ai l’impression de participé à quelque chose de positif qui va favoriser le développement de mon pays en général et de cette localité en particulier et à l’amélioration des conditions de vie des villageois et des conditions de travail des pêcheurs artisanaux.

Récemment j’ai beaucoup appris sur la maçonnerie, une discipline que je côtoie beaucoup et je m’aventure de plus en plus sur des choses que je ne connaissais pas, par exemple j’ai commencé à poser des briques et aider pour l’élévation des murs sur le poste santé et l’école sous les yeux très attentif des chefs de chantier.

J’ai gagné le respect de mes collègues grâce à ma détermination et mon implication. Je me suis toujours montrée intéressée et impliquée dans tous ce que je fais même les détails les moins important, qui passerais inaperçue pour leurs yeux de certains hommes.

J’ai constaté que ces derniers temps les femmes en Mauritanie font preuve de courage et occupent des postes qui étaient jusque-là 100% masculins, on compte maintenant des techniciennes de chantier, des mécaniciennes engins et des conductrices de travaux etc. pour moi c’est un signe d’espoir et d’ici quelques années on aura notre mot à dire dans le domaine de la construction.

Si je dois prodiguer un conseil aux femmes mauritaniennes qui veulent se former et travailler dans le secteur de la construction, c’est d’être persévérantes, robustes et patientes, car on sera toujours jugées soit dans le milieu professionnel soit par la société.

Un jour, je serai chef d’entreprise, et dans mon équipe, il y’aura des femmes et des hommes »